Présentation de l’éditeur
Les boucles d’oreilles violettes. Leur éclat diffus et – tremblotant. Si elle les portait encore, il la reconnaîtrait tout de suite… Elle serait là dans trois jours. N’avait indique ni son numéro de vol, ni d’où elle venait. « Allô, c’est Eva, ta mère. » Elle avait dû fumer beaucoup de cigarettes au cours de toutes ces années, la voix dans le répondeur lui parut plus épaisse et plus rauque que dans son souvenir.
Cet appel-là, Adam Ouria l’attendait depuis vingt-cinq ans. Il en avait dix quand sa mère l’avait abandonne sans la moindre explication, sans un mot. Bohème, fantasque, incapable de se fixer quelque part, elle ne devait jamais donner de nouvelles. Depuis, devenu médecin généraliste dans une grande ville israélienne, il porte en lui une part de peur et d’angoisse qu’il ne peut ni extirper ni partager avec quiconque. Un soir, il y a ce coup de téléphone…
Pendant trois jours, chaque pensée, chaque geste, chaque rencontre va prendre pour Adam une résonance particulière…
Avis d’Enora
Quand il était petit, Adam s’était juré qu’il deviendrait réalisateur de films, il se rêvait Salvatore de Cinéma Paradiso ; vingt cinq ans plus tard, il est devenu médecin généraliste dans une grande ville d’Israël. Même pas réalisateur de sa propre vie, l’abandon de sa mère quand il avait dix ans, le maintient spectateur. Il est toujours le petit garçon qui regardait vivre les autres, analysait les allées et venues des gens, pendant qu’assis sur les marches d’escaliers il attendait que sa mère revienne prendre soin de lui. Coincé dans les espaces de son enfance, il reste sur le seuil de sa vie, à observer.
Le traumatisme emprisonne ses facultés émotionnelles et le seul attachement qu’il s’autorise est l’amour envers sa grand-mère. Le sentiment de solitude est le seul compagnon fiable qu’il connaisse, et même l’amour que lui porte sa compagne, Eliana, ne peut extirper la peur et le désespoir qui l’habitent et qu’il ne peut partager. « Nous sommes tous seuls, même celui qui se chauffe à blanc pour se fondre dans la vie de celle qu’il aime ». Or voilà qu’un jour sa mère le recontacte et demande à le voir. Ce coup de téléphone pourrait être pour Adam, une sorte de catharsis.
Comme beaucoup d’auteurs israéliens, les thèmes de l’absence, de la disparition, de la difficulté pour une génération à se construire sur le vide du passé et du présent, hantent ce livre. Mais celui le plus central est peut-être de savoir comment, malgré les circonstances, on veut aborder sa vie. Adam, reste sur le seuil, sans y entrer, sans en sortir, sidéré dans l’espace temps/émotion. Ruth Sa grand-mère est une femme de bon sens, un pilier pour sa famille, ancre pour les instables, rampe pour les vacillants. Yaël Sa cousine est profondément croyante et accepte tous les coups du sort comme un cadeau de Dieu. Eva, Sa mère, considère la vie comme une pâte molle, destinée à être façonnée selon ses désirs. Pour Eliana aussi, la vie est un film mais elle ne laisse pas le long métrage dont elle est l’héroïne s’écrire tout seul sans intervenir et y repousser les limites connues. Ce qui la différencie d’Adam, c’est qu’elle a décidé d’aider les gens en souffrance, alors que lui les accompagne dans leur impuissance.
Mira Maguen a d’abord été enseignante avant de reprendre des études de psychologie et de sociologie pour finir par travailler comme infirmière à ‘hôpital Hadassah de Jérusalem. Ce parcours diversifié explique surement le relief de tous ses personnages et la façon dont leur profil psychologique est minutieusement fouillé. Elle réussit ici, un récit émouvant, vrai, dont l’élégance de l’écriture laisse le lecteur sous le charme.
Des papillons sous la pluie est son quatrième roman, mais le premier traduit en français, espérons que l’accueil chaleureux du public français incitera les éditeurs à éditer les trois autres.
Fiche technique
Format : broché
Pages : 422
Editeur : Mercure de France
Collection : Bibliothèque étrangère
Sortie : février 2008
Prix : 25 €