Zoli – Avis +

Présentation de l’éditeur

Poétesse rom à la voix de feu, Zoli fascine ceux qui l’approchent mais reste insaisissable. Élevée sur les routes par son grand-père, qui a bravé l’interdit tzigane en lui apprenant à lire et à écrire, Zoli découvre très jeune le pouvoir des mots. Mais coucher sur le papier l’histoire de sa communauté, c’est livrer aux gadze une partie de l’âme tzigane. Adulée par le régime communiste avant de devenir paria, bannie par les siens pour avoir transgressé les règles, Zoli paiera sa liberté au prix fort…

Avis d’Enora

« J’ai été fasciné par une femme et par une personne, une culture » confie Colum McCann. De fait c’est la vie de la chanteuse et poétesse polonaise Papusza, bannie par les siens dans les années 50, qui lui a inspiré le personnage de Zoli.

Nous sommes en 1930, Zoli a six ans et vient de perdre sa famille massacrée par les fascistes. Son grand-père va prendre en charge son éducation, allant même jusqu’à braver les traditions en lui apprenant à lire et à écrire. Les mots, elle les lit, les chante, les fait danser. Ils sont ses confidents, tour à tour ils l’ancrent dans ce monde en chaos, ou lui permettent de s’en évader, elle, la farouche dont tous veulent aliéner la liberté.

Quelques années plus tard, lorsque le communisme s’est installé en Tchécoslovaquie, Stransky, un poète fasciné par son talent cherchera à lui faire retranscrire par écrit ses poèmes pour les diffuser. Il est accompagné d’un jeune traducteur anglais qui tombera sous le charme de la jeune femme. Cet amour dévastateur lui fera commettre la pire des trahisons et mettra Zoli au ban de sa communauté. Rejetée, affamée, malmenée, Zoli part sur les routes pour atteindre Paris « La route n’en finit pas de la tristesse qu’elle m’ouvre ». Mais se battre pour survivre, elle l’a appris depuis son plus jeune âge…

Colum McCann nous livre un récit dont la fausse simplicité aliène le lecteur dès les premières pages. Cette plongée au cœur de la culture rom soulève un tas de questions auxquelles l’auteur ne cherche pas à donner de réponses. L’indignation devant les persécutions nazies que ce peuple a subies, ne suffit pas à étouffer la mauvaise conscience devant les mesures que le monde actuel prend face aux communautés nomades : savoir mieux que les autres ce qui est bien pour eux, remplacer « les étoiles par un plafond » sous prétexte de confort, les parquer dans des tours, étouffer leur culture…

Son bouleversant personnage principal incarne ce choc de deux mondes qui se détruisent par peur de leurs différences au lieu de s’en enrichir, Zoli est une femme libre, émouvante, rebelle, talentueuse, courageuse. Parabole sur l’exil autant physique qu’affectif, sur l’importance des racines et la recherche de la dignité, ce livre est un hymne à la liberté mais aussi à la mémoire, les Tziganes ayant été, avec les populations juives, les premières victimes du nazisme.

Pour l’écrire, l’auteur s’est immergé dans cette culture sur laquelle il avait énormément de préjugés, pour cela il est allé en Slovaquie dans les campements roms dont l’extrême pauvreté l’a révolté. Ce livre, il l’a fait aussi pour lever le voile du silence sur une communauté qui se meurt, essayer de faire connaitre une autre culture, essayer de faire comprendre les problèmes qui se posent et surtout provoquer l’empathie qui est selon Colum McCann, le sentiment primordial nécessaire à toute bonne politique.

Ce qui est sûr c’est que le très beau personnage de Zoli hante le lecteur longtemps après qu’il ait refermé le livre.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 352
Editeur : 10/18
Collection : Domaine étranger
Sortie : 6 novembre 2008
Prix : 7, 90 €