Soeurs mais pas trop – Avis +

Résumé

Dans la veine de Chaussure à son pied, de Jennifer Weiner, une comédie sensible sur la complexité des rapports entre sœurs, entre rivalité et complicité, haine et amour, jalousie et tendresse.

A les voir ensemble, difficile de croire que Lizbet et Cassie sont sœurs. Cassie, la plus jeune, est mince, vive, charismatique et ambitieuse. Seul point faible de sa vie archicontrôlée son mari, George, grand, super sexy, mais loin d’être Einstein.

Lizbet, l’aînée de cinq ans, est ronde, un peu paresseuse, souvent gaffeuse et très désordonnée. Elle est mariée à Tim, qui l’aime à la folie, même quand elle demande pourquoi les parents de Jésus ont donné à leur fils un prénom mexicain.

Malgré leurs différences et quelques chamailleries adolescentes, les deux sœurs ont grandi dans une entente parfaite. Jusqu’au jour où Lizbet annonce à Cassie qu’elle est enceinte. Et ce qui devait être le plus heureux des événements va déclencher une guerre sans merci entre les frangines, révélant au passage quelques secrets soigneusement enfouis. Peut-on tout pardonner à sa sœur ?

Avis de Marnie

Après avoir lu trois chapitres, totalement déconcertée, il m’a semblé nécessaire d’aller sur les sites anglo-saxons pour vérifier si l’opinion que j’étais en train de me faire était partagée ou non… Au milieu d’avis très positifs, deux appréciations ont retenu mon attention : la première disait, certes, c’est un bon roman, mais je souhaitais me détendre en dévorant de la chick-lit et ce livre m’a mis mal à l’aise, ce n’est pas ce à quoi je m’étais attendu et la seconde toute aussi intéressante affirmait que ce roman l’avait enthousiasmée, cependant qu’il était temps de revoir les codes de la chick-lit, ces histoires ayant tellement évolué que ceux qui adorent le genre ne se reconnaissent plus dans les nouvelles parutions présentées sous ce label.

J’ai donc poursuivi ma lecture un peu plus rassurée mais aussi et surtout parce que je n’ai pas pu le lâcher. Toutefois, il nous faut mettre en garde la lectrice de base chick-lit. Déjà, la parution sous cette couverture jaune « rigolotte », collection Mille Comédies, avec comme première phrase dans la quatrième de couverture une comparaison avec Jennifer Weiner (qui me semble totalement inadaptée) ainsi que l’expression « une comédie sensible »… en total décalage avec la réalité. Anna Maxted est britannique et non américaine et c’est certainement là que se situe le captivant dérapage totalement et astucieusement assumé.

Premier chapitre, tirage à vue désopilant façon Bridget Jones, avec pour cibles, maman, papa, Cassie la benjamine et les voisins, racontée à la première personne par Lizbet, la soeur aînée, avec la citation d’une marque toutes les quatre lignes, vivant dans un quartier huppé bien au-dessus de ses moyens avec son petit ami qui fait subsister le couple à coups d’inventions en marketing tous les cinq ans. Ils s’adorent et vivent très bien ensemble, mais horreur malheur, un enfant non voulu pointe le bout de son nez…

Certainement que sa soeur sera heureuse pour elle, non ? Cassie est une brillante avocate, belle, riche et sophistiquée et qui a trouvé chaussure à son pied. Au shabbat du vendredi soir traditionnellement chez les parents, Lizbet va annoncer la nouvelle avec des réactions des plus inattendues ! Nous comprenons que nous sommes passés de la chick-lit à la mom-lit… Et soudain, dans les dernières lignes du chapitre… le roman va prendre un virage à 390°.

Deuxième chapitre : C’est au tour de Cassie de nous raconter sa vie, et sa vision des mêmes évènements… alors qu’un secret de famille est dévoilé ! Après cette rupture de ton, les évènements plus ou moins tragiques vont se succéder, nous entraînant dans une histoire touchante et même par certaines côtés bouleversante. Bien évidemment, l’humour anglais est encore et toujours présent mais à chaque fois, il nous prouve une fois de plus que mieux vaut en rire qu’en pleurer. Le récit est très équilibré, les deux soeurs très différentes de caractère, de centres d’intérêts, d’envies et de besoins et tout aussi attendrissantes l’une que l’autre… Elles ont seulement en commun une chose : le désespoir de ne pas avoir eu la mère qu’elles auraient adoré aimer.

La judéité de Lizbeth et Cassie est primordiale ici, nécessaire pour la vision qu’elles se font d’une mère idéale. Se définissant comme des « juives light« , ni pratiquantes, ni spécialement croyantes, elles aspirent à avoir la maman juive type, dont elles auraient été le centre de l’existence, ainsi ce qui se traduit pour Cassie d’avoir choisi son mari parce qu’elle adore sa belle-mère…. Sous des aspects quelques fois grossiers, un regard vif, acéré, des détails subtils, l’introspection des deux soeurs va se poursuivre. Chacune va analyser, au passage sans vraiment se comprendre, ce qui les a amenées à un point de rupture tout en constatant avec un désespoir tragi-comique que personne ne se parle vraiment dans leur famille… Au fur et à mesure que le roman se poursuit, les épreuves vont forger le caractère aussi bien de Lizbeth que de Cassie, la maturité leur faisant comprendre que nous n’obtenons pas toujours ce que l’on veut mais qu’il nous faut avancer et aimer les autres avec les cartes qui nous sont distribuées.

Il n’y a pas de franche amertume dans ce chaud, et oui, délicieux récit, mais une réalité douce amère, où la dérision remplace le mélodrame, où certaines victoires se révèlent être des échecs, et certains drames nous donnent la force de transformer les conséquences en franches réussites avec un optimisme apaisé au final. Alors, si ce livre est un aperçu de la « nouvelle romance », nous en redemandons !

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 394
Editeur : Belfond
Collection : Mille Comédies
sortie : 18 septembre 2008
Prix : 18 €