Tromperie et séduction – Avis +

Présentation de l’éditeur

Nous sommes ruinés, Alexia. Je suis désolé, mais je ne peux plus t’entretenir.

Horrifiée, Alexia Welbourne comprend que son cousin la met à la porte. Elle va devoir quitter la demeure où elle vivait avec ses cousines et trouver un travail. Tout cela à cause de lord Rothwell, un homme sans cœur qui, bien que riche à millions, n’a pas hésité à les ruiner. Elle le déteste ! Pourtant, lorsqu’il lui propose un emploi de gouvernante, Alexia est bien obligée de ravaler sa fierté. Elle ne se doute pas que lord Rothwell va bientôt lui faire une proposition d’un tout autre genre et que, en dépit de la haine qu’elle semble éprouver à son égard, elle devra lutter contre la force irrésistible qui la pousse dans ses bras…

Avis de Marnie

Même si le titre semble mieux choisi que beaucoup d’autres, la version anglaise The rules of seduction est bien plus adaptée. En effet, ici, ce sont les règles [[the rules]] qui régissent ou déterminent tout. Nous sommes en pleine période post-régence, quelques années avant l’avènement de la reine Victoria. L’Angleterre est en passe de devenir la première puissance mondiale. La finance règne sur le royaume. Les fortunes se font et se défont suivant les scandales qui s’enchaînent. Mais si les aristocrates se prennent au jeu de la bourse comme ils s’amusent avec les dés et les cartes, les normes au sein de leur caste sont toutes aussi rigides. Les femmes en sont les premières victimes.

C’est ainsi que dès la première page du roman, nous faisons connaissance d’Alexia, parente pauvre, cousine de la famille Longworth. Les épreuves jusqu’ici ne l’ont pas épargnées. Amoureuse de l’ainé de ses cousins, Benjamin, perdu en mer lors de son retour de Grèce, alors qu’il venait de participer aux combats pour lutter contre l’envahisseur turc, la jeune femme vit de la charité du frère de celui qu’elle aimait, Timothy qui a repris la direction de la banque tenue naguère par Benjamin. Très proche de sa cousine Roselyn Longworth, elle apprend dès la fin du premier chapitre qu’ils sont ruinés et qu’elle doit trouver rapidement un moyen de subsistance.

Or, pour les femmes de la noblesse, les règles de base sont simples, un riche mariage ou alors elles perdent tout. Pour rester en phase avec son milieu, elle peut devenir gouvernante, mais si elle cherche un travail, toutes les portes se fermeront et la jeune femme perdra toute chance de fréquenter ce monde auquel pourtant elle tient. Seule autre option, devenir courtisane… ce qu’elle va froidement envisager, car notre héroïne est pragmatique. En même temps que la mort de son unique amour, s’est échappée toute chance de faire un mariage d’amour, ce qui ne la révolte pas outre mesure, car Alexia est une femme de son temps.

Si la jeune femme subit ce coup du sort sans se révolter, en recherchant le moyen de survivre avec dignité, tout son mépris est focalisé sur celui qui a précipité la perte de la fortune familiale, Hayden Rothwell, frère cadet du quatrième marquis d’Easterbrook, qui va alors sans cesse croiser son chemin. Meilleur ami de Benjamin, il n’hésite pourtant pas à jeter à la rue la famille Longworth… Financier hors pair, il s’occupe de faire fructifier l’argent de ses frères ou de sa tante, avec une glaciale retenue.

L’idée la plus intéressante de Madeline Hunter, ce n’est pas d’avoir opposé la glace et le feu, mais au contraire d’avoir lié par une attirance sexuelle deux être froids, lucides et raisonnés. Aussi durs, pragmatiques et cyniques l’un que l’autre, la situation va peu à peu leur échapper, et ne comprenant pas les brutales émotions qui les font agir de façon surprenante, ils vont apprendre à se découvrir mutuellement, avec méfiance, inquiétude en tentant d’analyser ce qui ne peut l’être…

Ce roman est une totale réussite… et une vraie découverte. Aucun anachronisme ne vient gâcher notre plaisir, les deux héros étant totalement intégrés dans leur époque. L’honneur et le devoir, la parole donnée, Hayden, en parfait gentleman, ne peut dévoiler les secrets qui pourtant le valoriseraient aux yeux d’Alexia, qui elle, doit composer avec le passé pour pouvoir s’engager dans un avenir où passion, amour et mariage ne vont pas forcément ensemble. La froideur des deux héros cache des traumatismes, des désillusions… Le ton n’est jamais léger, mais au contraire grave et profond. L’argent et la position sociale sont au coeur de la vie des héros, qui se débattent avec les mauvaises cartes qu’on leur a distribué.

Premier tome d’une nouvelle série, nous comprenons rapidement la raison pour laquelle, Madeline Hunter n’écrit qu’un roman par an, tant le contexte est fouillé, riche et réfléchi. Des méandres des scandales financiers aux us et coutumes d’une certaine société, tout est étudié, raconté sans que cela provoque une seule seconde d’ennui de la part du lecteur. Les personnages secondaires sont tout aussi passionnants. Ainsi, nous faisons connaissances du troisième frère Elliot Rotwell, toujours perdu dans ses études historiques ainsi que de la meilleure amie d’Alexia, une excentrique fille illégitime de professeurs, Phaedra, qui deviendront les deux héros du second tome, Lessons of Desire. D’autres personnages se distinguent comme Roselyn, première victime de la ruine familiale et qui ne se laisse pas gagner par l’amertume, prête même à se vendre si cela est nécessaire et qui sera l’héroïne du troisième tome, sorti au mois de juin aux États-Unis, Secrets of Surrender.

Cependant il faut avouer que nous attendons surtout l’histoire de Christian Rothwell, Marquis d’Easterbrook, le frère aîné de Hayden, un homme ténébreux, inquiétant, plus qu’étrange, dont les secrets et le mal-être semblent le submerger et qui promet d’être un héros remarquable dans le quatrième tome qui sortira en février 2009, The sins of Lord Easterbrook. D’ores et déjà, nous pouvons remercier Jai Lu d’avoir traduit un roman d’envergure dont l’écriture nous fait penser aux meilleures réussites de Mary Balogh… Histoire classique mais toute en émotion retenue, en maladresses avouées par deux héros qui emportent notre totale adhésion avec chacun une bonne dose de courage désespéré. Un vrai plaisir !

Fiche Technique

Format : poche
Editeur : J’ai Lu
Collection : Aventures & Passions
Sortie : juillet 2008
Prix : 6,50 €