Présentation
Un psychanalyste et un bibliste se risquent au dialogue. Le premier parce qu’il est intéressé par la capacité des textes fondateurs de notre culture à dire la spécificité de l’humus humain, le second parce qu’il est convaincu que la psychanalyse développe une approche de l’être humain qui n’est pas étrangère aux textes qu’il travaille.
Ils abordent successivement différentes thématiques, comme celles de la Loi, de la violence, du statut de la parole, de l’origine, de l’autorité, de l’altérité, du féminin. Ce qui les surprend tout au long de leurs échanges, c’est à quel point le texte de la Bible lu à la manière d’un mythe est sans cesse en résonance avec les concepts de la psychanalyse freudo-lacanienne.
Selon des manières certes différentes, le texte biblique et la psychanalyse donnent à entendre que le monde humain ne peut être pensé qu’en devant laisser sa place à ce qui échappe radicalement. C’est donc par leur portée anthropologique qu’ils se rejoignent pour interroger l’actualité de notre société. En donnant sa place au vide qu’un libéralisme débridé s’efforce d’exclure, ce sont les paramètres de l’existence humaine qu’ils cherchent à resituer dans ce monde en pleine mutation.
Avis d’Enora
Quand un analyste rencontre un théologien, leurs réflexions croisées donnent naissance à un petit livre des plus intéressants. La Bible est revisitée comme un récit mythique où la voix de Dieu, discours de la sagesse, signale à l’homme les choix dangereux tout en lui laissant son libre arbitre. En partant de la Genèse, Jean-Pierre Lebrun et André Wénin vont ainsi se questionner sur les origines ; sur les Lois pour être humains, de l’interdit de l’inceste à celui du meurtre ; sur la violence qui est une part inhérente de l’homme ; sur la parole à travers la vérité et le mensonge ; sur l’autorité et l’éducation, question importante dans une époque où l’enfant-roi n’est plus que l’instrumentalisation des désirs de ses parents ; et bien sûr l’altérité et le féminin.
La congruence de leurs points de vue peut au premier abord étonner et surprendre, et pourtant c’est Lacan qui a avancé que le mythe était la forme épique de la structure. Ces entretiens, qui redonnent toute la signification humaine au texte biblique, permettent de mettre en lumière comment les récits bibliques reflètent la structuration de l’être humain. Le jardin d’Eden avec sa sanction de la transgression de la limite rejoint la castration symbolique ; L’histoire de Caïn renvoie à la violence qui ne peut être canalisée que par la parole ; Le sacrifice d’Isaac résonne comme l’acceptation de son père de se séparer de lui, de lui permettre d’être sujet et de se socialiser en allant vers un tiers, ici vers Dieu.
A travers ces quelques exemples, on peut se rendre compte de la richesse des échanges dont l’espoir est de nourrir la réflexion d’un public plus large. Nul besoin d’être versé dans la psychanalyse ou les sciences bibliques pour prendre plaisir à lire ces dialogues, ils parlent à tous, parce qu’ils parlent avant tout de l’humain, de son origine, de ses désirs et de sa relation à l’autre. Ils inaugurent avec brio la collection des entretiens Humus.
Les auteurs
Jean-Pierre Lebrun, psychiatre et psychanalyste, ancien président de l’Association freudienne internationale, est l’auteur de nombreux ouvrages, dont Un monde sans limite (Erès, 1997), en collaboration avec Charles Melman, L’Homme sans gravité (Denoël, 2002), Rien n’est plus secret qu’une existence féminine (Erès, 2001), Clivage et modernité avec Roland Chemama (Erès, 2003), La perversion ordinaire: vivre ensemble sans autrui ( Denoël, 2007)
André Wénin, né en 1953, est docteur en sciences bibliques (Institut biblique de Rome). Il enseigne l’exégèse de l’Ancien Testament et les langues bibliques à la faculté de théologie de l’Université catholique de Louvain-la-Neuve. Il est également professeur invité à l’Université grégorienne de Rome pour la théologie biblique du Pentateuque.
Fiche technique
Format : broché
Pages : 229
Editeur : Erès
Collection : Humus Entretiens
Sortie : 21 février 2008
Prix : 15 euros