Les charmes discrets de la vie conjugale – Avis +

Résumé de l’éditeur

Pour son célèbre agitateur de père, pour son artiste de mère, Hannah Buchan est une vraie déception. A vingt ans, au lieu de se fondre dans l’ébullition sociale des années soixante-dix, elle n’a d’autre ambition que d’épouser son petit ami médecin et de fonder une famille.

Installée dans une ville du Maine, Hannah goûte aux charmes très, très discrets de la vie conjugale. C’est alors que le hasard lui offre l’occasion d’échapper à son quotidien : malgré elle, Hannah va se rendre complice d’un grave délit. Trente ans plus tard survient le 11 Septembre, et avec lui le temps du doute, de la remise en question, de la suspicion. Le passé d’Hannah va resurgir inopinément. Et du jour au lendemain, son petit monde soigneusement protégé va s’écrouler…

Avis de Marnie

Quelle sottise d’avoir intitulé un titre français totalement à côté du sujet alors que le jeu de mot state of the union, était tellement représentatif du contenu de ce roman ! En effet, il s’agit ici de l’état de l’union (le fameux discours prononcé une fois par an par le président des Etats-Unis), mais aussi d’un constat sur un mariage après trente-quatre ans de vie commune… dans un contexte totalement imprégné de politique et de bouleversements sociaux.

Cette nouvelle est construite en deux parties : 1966-1974 et 2003. Nous découvrons Hannah, fille d’un père universitaire, militant contestataire célèbre contre la guerre du Viet-Nam, et une mère peintre abstraite, déçue par l’esprit petit-bourgeois d’une fille qu’elle ne comprend pas mais dont elle cherche à diriger l’existence, en la manipulant, dans une sorte de jeu pervers. Le couple destructeur formé par ses parents va imprégner l’esprit de cette adolescente. Rapidement mariée et mère d’un petit garçon, la jeune femme se retrouve cloîtrée, sans espoir ni but, dans un village perdu au cœur de l’Amérique profonde. Et c’est là, que victime de circonstances, un de ses choix l’entraînera à commettre une erreur dont les répercussions vont être seulement perçues en 2003… année où nous retrouvons Hannah, qui a repris ses études et est devenue professeur, entourée de relations, amies, occupations en tout genre, épouse, mère et grand-mère aimante…

Dire que j’ai été impressionnée ? Non, mais passionnée oui, par ce personnage féminin qui, attendra l’âge de cinquante ans pour comprendre que notre personnalité forge notre destin. Hannah, tombée dans une spirale infernale mêlée de coïncidences et d’évènements catastrophiques qu’elle subit, est-elle seulement victime de la seule erreur qu’elle a commise ? Non. Ce serait bien trop simple… Que ce soit du à son vécu ou à l’éducation donnée par ses parents, la jeune femme cherchera à obtenir aussi bien consciemment qu’inconsciemment la sécurité émotionnelle et financière avant de pouvoir se trouver elle-même.

Le second personnage du livre, c’est le contexte politique. Certains pourront penser que c’est un constat excessif que nous décrit l’auteur. Les Etats-Unis sont-ils devenus la proie de patriotes, de fanatiques religieux intolérants et violents ? La course à l’argent facile a fait place aux idéaux et à la contestation où les fait divers livrés en pâture à des médias (journalistes, télévision…) broient de faibles humains ? Mais là encore, Douglas Kennedy a une réponse : « quand je suis faible, c’est que je suis fort »… Hannah va trouver les ressources en elle pour se relever et faire front. Sa famille pourra-t-elle en faire autant ? C’est là que le style de Douglas Kennedy est lucide et même acide, et ses démonstrations accablantes. Hannah a été élevée dans l’esprit libertaire des années 60 avec tous les excès mais aussi les grandes lois sociales insufflées par la libération de la femme. Mais ses enfants seront de jeunes adolescents pendant l’ère Reagan, puis happés par la mondialisation avant de retrouver la rigide moralité de Bush. L’auteur fait plus que prendre position : il dénonce cette Amérique hystérique qu’il ne reconnaît plus…

C’est par conséquent un très bon roman, au vocabulaire simple [[ce qui est souvent reproché à l’auteur, et qui est absurde]] qui nous conte un récit où se mêlent souffle, énergie et fureur… au suspense psychologique plein d’émotion et de sensibilité, qui retient l’attention du lecteur jusqu’au final réussi. Douglas Kennedy a un style percutant, accélérant les évènements pour former un piège “presque” sans issue. Un roman qui nous fait réfléchir à notre propre destin !

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 599
Editeur : Pocket
Sortie : 1 février 2007
Prix : 7,60 €