Mal de pierres – Avis +

Résumé de l’éditeur

Au centre, l’héroïne : jeune Sarde étrange « aux longs cheveux noirs et aux yeux immenses ». Toujours en décalage, toujours à contretemps, toujours à côté de sa propre vie… A l’arrière-plan, les personnages secondaires, peints avec une touche d’une extraordinaire finesse : le mari, épousé par raison pendant la Seconde Guerre, sensuel taciturne à jamais mal connu ; le Rescapé, brève rencontre sur le Continent, à l’empreinte indélébile ; le fils, inespéré, et futur pianiste ; enfin, la petite-fille, narratrice de cette histoire, la seule qui permettra à l’héroïne de se révéler dans sa vérité. Mais sait-on jamais tout de quelqu’un, aussi proche soit-il… Milena Agus dit de sa famille qu’ils sont  » sardes depuis le paléolithique « . Et c’est en Sardaigne que l’auteur de Mal de pierres a résolument choisi de vivre, d’enseigner et de situer son récit. Déjà remarquée par la presse italienne pour son premier roman, Milena Agus confirme ici son exceptionnel talent et sa liberté de ton

Avis d’Enora

C’est le second livre d’une auteur sarde, Milena Agus, le premier Mentre Dorme il pescecane aurait été rapidement réédité après sa première publication.

Ne parlant pas italien, la seule indication que j’ai trouvé sur ce roman est ceci : « Le premier livre de Milena Agus, Mentre dorme il pescecane (Nottetempo, 2005, 176 pages) traite également d’une saga familiale, celle des Sevilia Mendoza, une famille sarde depuis le Paléolithique supérieur. La narratrice a épousé un homme aux goûts pervers (joyeusement appelé le « sardo-maso » !) ainsi qu’on peut lire sur le site de son éditeur. » .

On ne pouvais laisser passer ce trait d’humour que l’on retrouve dans son livre ! Je pense en particulier au passage savoureux ou la jeune femme qui a été éduquée à la sexualité par un mari habitué des maisons closes, énumère à son amant lors de leur première nuit toutes les prestations qu’elle peut lui offrir !

La citation en exergue, tiré du film de Terrence Malick La ligne rouge : Si je devais ne jamais te rencontrer fais qu’au moins, je sente le manque de toi, nous met tout de suite dans le ton du récit.

Roman ou récit autobiographique ? Milena Agus laisse planer le doute. La narratrice nous conte l’histoire de sa grand-mère maternelle qu’elle reconstruit à partir des confessions de celle-ci. C’est l’occasion pour nous de découvrir la Sardaigne du début du XXe siècle, la vie de ses habitants et la place des femmes dans cette société marquée par le catholicisme. Cette grand-mère fut en décalage dès son plus jeune âge car elle savait lire et écrivait des poèmes. Cette différence lui vaudra la haine de sa mère et l’ancrera dans l’idée qui lui manque LA chose principale dans la vie : une capacité à se faire aimer. D’où ses tentatives de suicide dans son adolescence puis sa maladie de pierres (toutes ces pierres dans nos corps comme dira son amant, ces pierres qui cristallisent la souffrance) et ensuite ses fausses couches à répétitions. Sa famille envisagera même de la faire interner jusqu’à ce qu’enfin quelqu’un se décide à la demander en mariage, c’est-à-dire à la faire rentrer dans le moule destiné aux femmes de cette génération. Dans chaque famille, il y a toujours quelqu’un qui paie son tribut pour que l’équilibre entre ordre et désordre soit respecté et que le monde ne s’arrête pas et cette femme le paiera jusqu’à la limite de la folie. Car comment reconnaître l’amour sous sa forme humaine et banale quand on se berce des récits de Dante et qu’on a pour référence la passion de Paolo et Francesca ? C’est là toute l’histoire de cette jeune Sarde que je ne vais pas révéler mais qui s’achève par un coup de théâtre final lorsque la narratrice trouve le journal personnel de sa grand-mère après sa mort.

Au final, c’est une très jolie découverte que ce petit récit qui a reçu, mardi 19 juin 2007, le prix Relay du Roman d’Evasion et c’est une auteur à ne pas perdre de vue.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 123
Editeur : Liana Levi

Collection : Littérature
Sortie : 4 janvier 2007
Prix : 13 €