Eliza l’impétueuse – Avis + et –

Résumé

En 1814, dans la haute société londonienne, Eliza Merriweather rêve de partir en Italie pour étudier la peinture et ne souhaite aucunement se marier, au grand dam de sa famille. Cependant, ses deux tantes ont retrouvé un livre particulier qui permet selon elles de se dégoter un mari et suivent scrupuleusement les règles édictées pour Eliza et sa sœur Grace !

Qu’à cela ne tienne, Eliza trouve une parade en la personne de Magnus McKinnon, un aristocrate au bord de la ruine qui doit épouser une riche héritière afin de sauver son domaine : en échange de sa cour factice pour éliminer ses prétendants, elle s’engage à lui trouver la fiancée parfaite.

Avis de Marnie

Dans la présentation de cet auteur totalement inconnu, l’éditeur nous précise que Kathryn Caskie a été remarquée par l’actuelle reine de la romance, Nora Roberts. Malheureusement, on peut se demander si remarquer est ici synonyme d’admirer. Est-il encore possible de renouveler le style “régence” ? En fait oui… Des auteurs comme Sabrina Jeffries, Laura Lee Guhrke , Anne Gracie, Leslie Lafoy ou encore Liz Carlyle ou Jackie d’Alessandro y parviennent heureusement aisément. Mais pour ce roman, c’est loin d’être gagné.

S’il s’agissait d’un roman contemporain, l’histoire serait crédible ; l’héroïne désargentée, quelque peu désillusionnée par le mariage de ses parents, souhaite partir en Italie pour étudier la peinture. En 1814, ce sujet paraît grotesque en soi, mais si le reste de l’intrigue nous fait oublier ce point de départ, pourquoi pas ? Lorsque l’on est emporté par le récit, les anachronismes peuvent nous faire grimacer, seulement on les oublie rapidement emportés par le sujet. Ici, ils nous sautent aux yeux. Comment imaginer qu’on laisse sciemment plusieurs fois les deux héros en tête à tête, sans que la jeune fille ne soit irrémédiablement compromise ? Que l’héroïne réagisse comme une furie lorsqu’on lui tient des propos sur l’inégalité des sexes, plus que convenus et normalisés par une société engluée dans des carcans étroits et rigides ? Aspirer à une carrière artistique est déjà un anachronisme en soi… et que penser d’une famille normale même si elle est un peu excentrique, de la haute société britannique, qui considère comme une péripétie amusante, alors que l’on est en 1814, la fuite d’une des deux filles à marier à Gretna Green ? Je ne peux dévoiler d’autres anachronismes encore plus étonnants parce qu’ils font partie de l’intrigue, mais tout de même, il n’y a rien de plus énervant que de donner aux personnages de romans d’une certaine époque des caractères contemporains.

J’appelle ce genre de tentatives, les romans « sel et poivre ». Tous les condiments y sont mais la sauce ne prend pas : humour, amour, passion, drame, rebondissements, fâcheries, le tout assaisonné de quelques scènes de sexe. Honnêtement, je ne garderait comme point positif que l’aspect humoristique. Les deux vieilles tantes et leur majordome qui passent le temps à appliquer des stratégies militaires pour une course aux maris, leurs deux nièces transformées en cobayes, apportent de la fraîcheur et un côté réjouissant à cette histoire. Les mésaventures tragicomiques qui en découlent paraissent sympathiques mais totalement superficielles. Cela se lit vite et s’oublie tout aussi rapidement. Toutefois, j’affirme qu’un divertissement a tout le même droit de représenter autre chose qu’un fait divers du jour !

Reste ce qui normalement fait l’intérêt principal de ce genre de romans : la peinture de caractères. Les deux héros sont assez conventionnels. Tour à tour entêtés, passionnés, coléreux, orgueilleux, manipulateurs mais altruistes, l’auteur les a créé forts mais peut-être un peu trop semblables ne manifestant ni profondeur ni introspection dans laquelle on pourrait se reconnaître. Si les tantes excentriques sont amusantes et adorables, Grace, la sœur d’Eliza est bizarrement antipathique. Elle se veut la plus féminine et romantique des deux mais fait preuve dans tout ce qu’elle entreprend d’un désagréable cynisme… Trois ou quatre autres personnages plus que secondaires complètent le tableau mais sans aucun intérêt.

Au final, une petite intrigue totalement formatée, certainement construite au vu des recettes obligées de la romance, pour des lectrices qui apprécient les critères sans surprise, moraux bien établis, mais malheureusement un récit qui ne laisse aucune place à l’enthousiasme, la nouveauté et à l’imagination !

Avis de Francesca

Kathryn Caskie est un nouvel auteur qui a été remarquée et suivie par d’illustres auteurs de romance, tels que Nora Roberts, Eloisa James ou Mary Jo Putney. Avec ce premier livre d’une série qui en comporte actuellement 4 en version originale, elle signe un roman excellent et enlevé mélangeant une intrigue rythmée, des personnages attachants et des moments franchement comiques sans oublier bien entendu de la sensualité et de l’amour.

Eliza est une jeune fille peu conventionnelle pour son époque. Dotée d’un tempérament rebelle et indépendant, elle refuse de se plier aux exigences concernant les débutantes et de chercher un mari. Motivée par son futur petit héritage lui permettant de partir en Italie, elle met au point un plan avec Douglas afin d’échapper à la cohorte de prétendants que ses tantes veulent lui présenter. Toutefois, elle n’avait pas prévu de tomber amoureuse de lui alors qu’elle sait pertinemment qu’ils ne pourront jamais se marier. Elle l’aidera à s’en sortir malgré ses sentiments.

Douglas est un homme bien sous tous rapports qui souhaite racheter le discrédit de son père en sauvant son domaine. Il se laisse rapidement entraîné dans le stratagème d’Eliza sans savoir vraiment ce qu’il fait. Néanmoins, il est attiré par elle et comprend rapidement que c’est la femme de sa vie. Déchiré entre son devoir et son amour pour elle, il espère la réussite de son investissement dans un navire mais celui-ci est porté disparu.

La relation entre eux est classique avec le sacrifice que chacun fait pour le bonheur de l’autre avec des malentendus et des larmes à la clé. La passion est au rendez-vous, surtout que l’amour entre eux est clairement perceptible et attendrissant.

Cependant, la réussite de cette histoire tient moins dans les deux héros que dans l’originalité dans la construction du récit, la loufoquerie des personnages secondaires et le comique de situation qui en résulte. Les deux tantes d’Eliza sont absolument délicieuses. Vieilles filles, Letitia et Viola sont des jumelles qui sont inséparables et ont en tête de marier leurs nièces. Prenant appui sur un livre de stratégie militaire qu’elles utilisent comme manuel de séduction, elles mettent au point des stratégies afin d’attirer des prétendants et suivent les instructions pas à pas. D’ailleurs, chaque chapitre est introduit par une des règles du livre et qui correspond au contenu. Curieuses, se mêlant de tout et surtout de ce qui ne les regardent pas, ces deux femmes représentent les véritables héroïnes à elles-seules dans cette histoire. De plus, Viola est atteinte d’une étrange maladie qui la pousse à s’endormir brusquement sous le coup d’une émotion violente, ce qui donne lieu à des instants vraiment hilarants.

Le ton est enjoué et vif et le rythme tel qu’on fait rapidement partie intégrante de cette famille déjantée uniquement constituée de femmes et d’un majordome soumis au vertige. C’est un vrai moment de bonheur qui nous est proposé. Espérons que la suite vienne très vite !

Fiche technique

– Format : poche
– Pages : 282
– Editeur : J’ai Lu
– Collection : Aventures et Passions
– Sortie : 2 juin 2007
– Prix : 5,90€