Mort de Rosa Parks

Source : Associated Press

Ce 1er décembre 1955, quand Rosa Parks, femme noire, refuse de céder sa place à un homme blanc dans un autobus dans une ville du Sud des Etats-Unis, elle ignore que son geste révélera Martin Luther King et surtout aboutira à l’abolition de la ségrégation raciale en 1964. Surnommée « la mère du mouvement des droits civiques », elle est morte chez elle à Detroit lundi, à l’âge de 92 ans.

En 1992, cette pionnière restée modeste avait tenu à faire une mise au point: d’aucuns affirment « que j’avais mal aux pieds et que je ne savais pas pourquoi j’avais refusé de me lever comme on me le demandait. Mais la véritable raison (…) est que j’avais le sentiment d’avoir le droit d’être traitée comme n’importe quel autre passager. Nous supportions ce traitement depuis trop longtemps ». À l’époque, la loi exigeait la séparation des Noirs et des Blancs dans les autobus, restaurants et lieux publics dans le Sud des Etats-Unis tandis que dans le Nord, la discrimination raciale, pourtant illégale, tenait les Noirs à l’écart de nombreux emplois et quartiers.

Pour avoir refusé de se lever dans un bus de Montgomery (Alabama), Rosa Parks, couturière de 42 ans, militante de l’Association nationale pour le progrès des gens de couleur, a été envoyée en prison et a écopé d’une amende de 14 dollars. Quelque temps auparavant, deux autres femmes noires de Montgomery avaient été arrêtées pour la même raison. Mais cette fois la coupe était pleine.
Un pasteur alors peu connu, futur prix Nobel de la paix, Martin Luther King, appela au boycottage des transports en commun de la ville qui dura plus d’un an (381 jours exactement), privant la compagnie de son importante clientèle noire. « Je n’avais pas idée que cela allait tourner ainsi », a déclaré par la suite Rosa Parks.

Un an auparavant, la Cour suprême des Etats-Unis s’était prononcée pour la déségrégation des écoles. En 1964, la loi fédérale sur les droits civiques mettait fin à la discrimination dans les lieux publics. Le maire noir de Detroit, Kwame Kilpatrick, a rendu hommage lundi soir à Rosa Parks: « Elle s’est levée en restant assise. Si je suis ici, c’est uniquement grâce à elle ». Contrairement à Martin Luther King, assassiné en 1968, et à Malcolm X, autre militant pour l’égalité raciale, assassiné en 1965, Rosa Parks a vu la société américaine évoluer et les tabous tomber, même si du chemin reste à parcourir.

En 1988, la militante Parks mettait la jeunesse en garde contre la tentation de prendre l’égalité pour acquise. « Nous avons essayé de protéger les jeunes de ce dont nous avons souffert et, ce faisant, nous avons eu l’air d’être plus complaisants. Nous devons redoubler d’efforts pour essayer d’inspirer notre jeunesse et les inciter à vouloir étudier notre héritage ainsi qu’à savoir ce que cela signifie être noir dans l’Amérique d’aujourd’hui », déclarait-elle.
En octobre 1995, elle a participé à la Million Man March qui a rassemblé plus d’un million de Noirs à Washington. En 1996, elle avait reçu la Médaille présidentielle de la liberté pour sa contribution à la société américaine. Elle ne comptait plus les hommages et récompenses.

Elle est morte entourée de ses proches à Detroit, où elle avait déménagé en 1957 avec son époux Raymond, mort en 1977, pour échapper au harcèlement et aux menaces. De 1965 à sa retraite le 30 septembre 1988, elle a travaillé dans un bureau en tant qu’assistante. Après sa retraite, elle avait consacré du temps au Rosa and Raymond Parks Institute for Self Development, un institut destiné à promouvoir la lutte pour les droits civiques auprès des jeunes.

SOS Racisme lui a rendu hommage aujourd’hui.

« Le courage de Rosa Parks témoigne de ce que chacun d’entre nous a la capacité de contribuer à édifier un monde meilleur et plus juste. Cette femme restera, pour tous les antiracistes, un bel exemple de simplicité, de ténacité et de fraternité », déclare dans un communiqué l’organisation française de lutte contre le racisme. « Son refus de l’arbitraire raciste en Alabama, à partir de son refus de céder la place à un Blanc dans un bus de Montgomery (1er décembre 1955, Ndlr), enclencha une mobilisation générale les Noirs et des anti-ségrégationnistes », rappelle dans un communiqué l’organisation française de lutte contre le racisme. « Cette action, finalement couronnée de succès, montra à tous ceux qui oeuvraient pour la pleine reconnaissance des droits civiques aux Etats-Unis que la mobilisation pouvait payer et faire changer des situations que beaucoup de Noirs pensaient figées. »

« Le courage de Rosa Parks témoigne que chacun d’entre nous a la capacité de contribuer à édifier un monde meilleur et plus juste. Cette femme restera, pour tous les antiracistes, un bel exemple de simplicité, de ténacité et de fraternité », estime SOS Racisme.