Le Discours d’un roi – Avis +

Présentation Officielle

D’après l’histoire vraie et méconnue du père de l’actuelle reine Elisabeth, qui va devenir, contraint et forcé, le Roi George VI (Colin Firth), suite à l’abdication de son frère Edouard VIII (Guy Pearce). D’apparence fragile, incapable de s’exprimer en public, considéré par certains comme inapte à la fonction, George VI tentera de surmonter son handicap grâce au soutien indéfectible de sa femme (Helena Bonham Carter) et d’affronter ses peurs avec l’aide d’un thérapeute du langage (Geoffrey Rush) aux méthodes peu conventionnelles. Il devra vaincre son bégaiement pour assumer pleinement son rôle, et faire de son empire le premier rempart contre l’Allemagne nazie.

Avis de Callixta

Les films qui réunissent l’approbation de la critique et du public ne sont pas si fréquents. Ce n’était pas évident que Le Discours d’un roi réussisse cet exploit. En effet, comment faire un film passionnant autour d’un personnage oublié de l’histoire, le peu charismatique George VI, roi d’Angleterre de 1936 à 1952, éclipsé par la flamboyance de son frère ou la longévité de sa fille, Elizabeth II ?

Pourtant Tom Hopper a réussi cet performance en réalisant un film simple qui habilement dépouille George VI de ses habits de roi pour faire apparaître Bertie, comme le surnommait alors ses proches. C’est en effet une histoire d’homme que nous offre le réalisateur. Celle d’un homme touchant, peu connu que les circonstances ont propulsé sur le devant de la scène, lui qui la craignait tant.

Héritier d’une couronne inattendu, c’est un homme timide, marqué par une enfance difficile qui lui a laissé un bégaiement tenace et handicapant. C’est aussi une histoire d’amitié masculine, improbable entre ce personnage de la plus haute société britannique et un thérapeute, sans diplôme qui trimballe ses propres échecs et est issu d’une colonie, l’Australie, que les Britanniques regardent avec un dédain à peine dissimulé.

Tom Hooper se concentre sur ces deux hommes adjoignant parfois, Elizabeth, l’épouse fidèle et indispensable à son mari qu’était alors celle que les Anglais surnommeront plus tard affectueusement Queen Mum. Cela laisse la part belle au jeu des acteurs principaux tous impeccables et justement nominés ou déjà récompensés.

Colin Firth s’impose totalement dans le rôle de Bertie. Qui d’autre que lui pourrait à la fois montrer la hauteur royale et la fragilité d’un tel homme ? Il réussit à faire passer le moindre de ses sentiments dans sa pose, ses regards, le langage trahissant si souvent George VI. Face à lui, George Rush affiche une attitude décontractée qui dissimule sa sensibilité et son intelligence.

Helena Bonham-Carter s’impose elle aussi totalement dans ce rôle secondaire mais fondamental. Elle offre un portrait très attachant de cette reine si aimée des Anglais, proche de son époux, tendrement encourageante et dotée de cet humour britannique si caractéristique. Ce trio est parfaitement complété par des acteurs que l’on a pu croiser dans Harry Potter comme Michael Gambon ou de nombreux comédiens britanniques qui ont fait les beaux jours des séries anglaises.

Mais cette histoire d’homme touchante, intime rejoint la grande histoire. Évoqué de façon claire par quelques scènes qui ébauchent davantage qu’elles n’explorent, le contexte des années trente est parfaitement rendu. Les rues de Londres, les personnages importants de l’époque sont évoqués de façon impeccable et surtout la montée du nazisme et la nécessité de clarifier la position britannique sur l’échiquier mondial. Ce contexte de montée de la guerre transcende le drame personnel de George VI. Ces années de lutte contre son handicap sont aussi celles de la naissance d’un grand roi dont la position ferme contre les nazis avant et pendant la guerre sera fondamentale.

Cette rencontre entre des hommes et l’Histoire est parfaitement rendu dans le film le rendant accessible à tous d’une manière universelle. Tom Hooper a bien fait d’écouter sa mère, qui aurait été la première, dit-on, à percevoir les potentialités du scénario. Avec une mise en scène très classique, presque simple parfois, il a pourtant réussi à doser subtilement tous les éléments de son film, offrant une œuvre divertissante, émouvante et intelligente.

Avis de Marnie

Au départ, une anecdote de l’Histoire que la plupart des gens ignoraient ou avaient oublié et nous aboutissons à une comédie dramatique enthousiasmante plusieurs fois nommée aux prochains Oscar. Le succès critique et public est mérité et met surtout en relief un scénario riche et parfaitement maîtrisé, une interprétation hors pair, et un superbe et habile dosage entre émotion, humour et drame.

Même si la réalisation très classique et très sage de Tom Hooper [[qui n’a rien fait jusqu’ici pour nous montrer qu’il était un grand réalisateur]], nous fait penser qu’un Oscar donnerait une image quelque peu surestimée de ce film, le sujet est passionnant puisqu’il dépasse l’aspect anecdotique ou historique pour mettre en scène un homme qui parvient à force d’obstination, de courage et de motivation, à surmonter son handicap.

Colin Firth est littéralement parfait ! Qui pouvait interpréter avec autant de crédibilité ce frère « terne » de l’héritier du trône, ce dernier charismatique, extraverti et charmeur ? Notre héros, ou plutôt anti-héros est traumatisé par une enfance difficile, doté d’une sensibilité qu’il a du mal à maîtriser, intelligent, intéressé et préoccupé par les affaires de l’Etat, colérique et renfermé… toute une gamme de sentiments exacerbés se devinent derrière ce visage froid et flegmatique et cette démarche raide.

Cela se traduit par un bégaiement pénible, humiliant qui handicape gravement la vie publique mais aussi personnelle du duc d’York, même s’il bénéficie du soutien indéfectible de son épouse (Helena Bonham-Carter qui retrouve toute la classe et la spontanéité « sophistiquée » qui caractérisait sa formidable prestation dans Chambre avec vue), et de ses deux filles.

Par petites scènes et notamment une très grande qualité et subtilité des dialogues, se dessinent plusieurs facettes de ces « illustres » personnages : ainsi le futur Edouard VII (impeccable Guy Pearce) est aussi séduisant que futile et superficiel, George V (impressionnant Michael Gambon), monarque sérieux et concerné était aussi connu pour terrifier ses enfants. Vous l’aurez remarqué, nous retrouvons une bonne partie du casting de Harry Potter, ainsi, Timothy Spall, qui interprète pour la seconde fois de son existence, Churchill.

Remarqué et toujours remarquable, Sir Derek Jacobi (Cadfaël) nous offre une de ses interventions éclair imbues de lui-même dont il a le secret, mais aussi l’apparition d’une des grandes dames du cinéma des années 50 et 60, Claire Bloom (Richard III, Les Feux de la rampe). Nous noterons aussi le petit rôle en forme de clin d’oeil de l’actrice Jennifer Ehle, qui affrontait Colin Firth dans une adaptation restée mémorable d’une production de la BBC, Orgueil et préjugés.

Hormis ce contexte historique et véridique, c’est la relation entre ces deux hommes que tout sépare, le duc d’York, Colin Firth, et l’australien Lionel Logue (Geoffrey Rush, une fois de plus totalement habité par son personnage) [[le scénario est inspiré de ses mémoires]], qui nous offre les meilleurs moments de bravoure. La profonde amitié qui va se nouer entre ces deux êtres socialement à l’opposé l’un de l’autre, mais aussi de caractère très différents, est empreinte de profondeur et de sensibilité, transcendant de beaucoup le thème évoqué.

C’est donc une lecture sur plusieurs tons qui nous est proposée avec ce récit, qui peu à peu se transforme en une jolie et délicieuse histoire pleine de chaleur et de charme, imprégnée d’humour et d’émotion perceptible de la première à la dernière minute.

Fiche Technique

Avec Colin Firth, Helena Bonham Carter, Derek Jacobi, etc.

Titre original : The King’s Speech

Genre : drame historique

Durée : 118 minutes

Distributeur : Wild Bunch Distribution