La princesse Caroline, celle par qui le scandale arrive….

Les démêlés des « peoples », comme on dit maintenant, font les choux gras d’une certaine presse (que personne ne lit mais dont l’excellent chiffre d’affaires raconte une autre histoire !) et parmi les articles les plus recherchés, il y a ceux concernant les princes et princesses. Ils conservent, même dans les républiques, une aura particulière. Pour nous, Français, c’est souvent vers Monaco que nous devons nous tourner ou vers la cour d’Angleterre qui a, c’est vrai, été particulièrement riche en évènements et scènes de ménage à la fin des années 90 !

L’histoire de Diana et de Charles d’Angleterre a défrayé la chronique en son temps. Il en fut de même du mariage tumultueux du futur George IV qui épousa alors qu’il était encore prince de Galles, la princesse allemande Caroline de Brunswick. On ne pouvait imaginer couple plus mal assorti.

Le prince de Galles consentit à épouser celle qui était sa cousine, seulement parce qu’il était couvert de dettes que son père refusait d’éponger, s’il n’y avait pas mariage. On raconte qu’après la rencontre avec sa promise, le Prince se serait exclamé : « Qu’on m’apporte vite un brandy » ! Il la trouvait sale, et en plus laide.

En 1795, il épousa en grande pompe Caroline. Ses dettes faramineuses qui s’élevaient à près de 630.000 livres furent effacées par un vote du Parlement (déjà le contribuable était sollicité !) et le mariage fut instantanément un désastre. Ils ne vécurent qu’un an ensemble, le temps de mettre au monde une héritière, la princesse Charlotte. D’ailleurs, cette enfant est née d’un des trois rapports sexuels entre ses parents. Les lettres du couple révèlent ce détail intime, et même les nuits exactes où cela s’est produit.

Le conflit entre les deux époux est extraordinairement moderne. Caroline ne s’en laisse pas compter et, en 1804 par exemple, une lutte s’engage pour la garde de la petite Charlotte. En désespoir de cause, elle est confiée à son grand-père, le roi George III, malheureusement fou (il souffrait de porphyrie).

Mais cette lutte conduit à une enquête sur les deux époux et là tous les coups sont permis. La cour se divise entre ceux qui soutiennent le Prince et ceux qui défendent la cause de la Princesse. Pour nuire à Caroline, en 1806, une rumeur va courir disant qu’elle a mis au monde un enfant illégitime (qui serait le fils d’un valet !). C’est particulièrement amusant puisque, sans enquête, il aurait été facile de retrouver les nombreux bâtards de George. Il a vécu presque ouvertement avec plusieurs femmes et entretient alors une liaison compliquée mais durable avec une catholique (horreur !) deux fois veuves (malheur !), Madame Fitzherbert. Il a même épousé la jeune veuve en 1785 mais le mariage n’est pas valide selon les lois britanniques (pas de catholiques dans la famille royale, ça rappelle de trop mauvais souvenirs !) et de toute façon, il n’a pas demandé l’autorisation à son père !

Mais pour la princesse Caroline, le cas est plus grave : une femme ne se conduit pas comme une gourgandine surtout si elle est la future reine d’Angleterre. Si le petit garçon qu’on soupçonne être son fils est celui du prince de Galles, il aurait prétention au trône, s’il ne l’est pas… il ne faudrait pas que sa mère puisse en faire un futur roi. Et l’enquête, si elle ne prouvera jamais la naissance illégitime ni que cet enfant est le fils de la Princesse (les tests ADN ne permettent plus ce type d’indécision !) révèle que Caroline a mené une vie très libre ! Elle a des amants : George Canning, un homme politique, un militaire Sydney Smith…

Sa réputation est terrible même si elle reste populaire et elle va, à partir de 1814, vivre hors d’Angleterre. Elle profite de sa liberté pour vivre sur un grand pied, faire des dettes dans toute l’Europe et accumuler les amants. Son comportement défraie la chronique, elle danse torse nu dans un bal en Suisse, devient la maîtresse d’un frère de Napoléon…

C’est à l’étranger qu’une lettre de son gendre l’avertira de la mort en couches de la princesse Charlotte, sa fille, en 1817. Pour la petite histoire, le mari de Charlotte était Leopold Saxe-Cobourg, futur roi des Belges, un fort bel homme. Elle revient en Angleterre en 1820 lorsque son époux devient roi à la grande fureur de celui-ci qui exige un divorce. Il va même tenter de voter une loi spéciale pour se débarrasser d’elle, en pure perte. Si la loi passe à la Chambre des Lords, elle échoue à la Chambre des Communes. Cela révèle que Caroline a une extraordinaire image dans le peuple et demeure très populaire malgré tout.

Une nouvelle enquête est alors menée pour salir l’image de Caroline. Interrogée devant les Communes, elle reconnaîtra un seul adultère commis avec « le mari de Madame Fitzherbert » ! Elle ne manquait pas d’esprit.

George réussit à l’empêcher à entrer à Westminster lors du couronnement en 1821 et de façon fort bizarre, elle tombe malade et meurt trois semaines plus tard, persuadée d’avoir été empoisonnée. George refusera qu’elle soit enterrée en Angleterre, elle gît donc en terre allemande mais porte toujours officiellement le titre de Reine d’Angleterre.

Ah ! Si Diana avait vécu et avait été taillée dans le même bois que cette princesse allemande, Charles en aurait vu des vertes et des pas mures !

Hormis le côté rocambolesque et très agité de cette affaire, elle a ébranlé la monarchie britannique. Au moins à deux reprises, la question s’est posée de confier le pouvoir au Prince de Galles dont la réputation (déjà en berne !) était si mauvaise. Cela a créé des tensions importantes au sein de la noblesse et a montré la monarchie sous un jour ridicule.

On ne peut par contre s’empêcher d’éprouver de la sympathie pour cette impétueuse princesse qui n’a jamais cédé devant son mari et qui a juste cherché à l’égaler à une époque où elle n’en avait pas le droit !

Frappantes aussi les similitudes entre cette histoire et l’union de Charles et Diana qui, elle aussi, mourra prématurément même si les causes semblent totalement accidentelles aujourd’hui. Diana, comme Caroline, a essayé d’échapper à son mauvais mariage avec les moyens à sa disposition et a aussi, par sa popularité, remis en question la famille royale et même le bien-fondé de la monarchie.

L’histoire est un éternel recommencement !