En quête de vérité – Avis +

Présentation de l’éditeur

Motivé par le désir de « savoir » pour rétablir ce qu’il qualifie de « profanation mémorielle », René Guitton, déjà auteur d’un livre remarqué sur les moines de Tibhirine en 2001, a poursuivi des recherches en France, en Algérie, en Italie, en Suisse, en Belgique et dans le reste de l’Europe et de l’Afrique, auprès d’hommes de l’ombre, de responsables politiques, ministres, services secrets français et algériens, juges, ambassadeurs, familles des victimes, responsables du Vatican, des Eglises et des communautés religieuses dont Sant’Egidio, de généraux, de terroristes repentis et non repentis…

Grâce à une analyse rigoureuse, documentée, et à des éléments inédits, ce livre s’efforce de faire la lumière, quinze ans après les faits, sur de très nombreuses zones troubles concernant les circonstances de l’enlèvement des moines trappistes en mars 1996 et de leur mort deux mois plus tard, en apportant une foule de révélations.

Défenseur ardent de la dignité humaine, passeur infatigable des courants de pensée, René Guitton oeuvre depuis de nombreuses années pour un dialogue philosophique, culturel et religieux entre l’Orient et l’Occident. Il est membre du réseau d’experts de l’Alliance des Civilisations des Nations unies.

Parmi ses nombreuses publications : Si nous nous taisons (Calmann-Lévy, Prix Montyon de l’Académie française, Prix Lyautey de l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, Prix Liberté) et Ces chrétiens qu’on assassine (Flammarion, Prix des Droits de l’homme).

Avis de Claire

L’affaire des moines de Tibhirine, par son côté tragique et mystérieux, fascine la France depuis quinze ans déjà. Là où le film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux (2010), dont l’immense succès montre l’attachement des Français à la mémoire des moines trappistes de l’Atlas, ne prenait jamais parti, se contentant de proposer ‘une’ version des faits parmi d’autres, le livre-choc de René Guitton explore des pistes et tente même d’apporter des réponses.

Nous pourrions presque convoquer à nos mémoires le fameux leitmotiv qui taraudait les esprits au plus fort de la tragédie algérienne des années 90 : « qui tue qui ? » et dont l’image la plus forte reste la fameuse photographie dite de la ‘Madonne de Bentalha’. Les moines étaient-ils là au mauvais endroit au mauvais moment ? Victimes des terroristes ? Erreur de frappe de l’armée algérienne ?

Pour René Guitton, les évènements tels qu’ils ont été communiqués à l’époque sont loin d’être aussi simples. Si le GIA (Groupe islamiste armé, autonommé comme tel) semble bien l’auteur de l’enlèvement, les autorités algériennes ne seraient pas étrangères au drame qui a suivi.

Cependant, si la clef ultime de l’énigme est encore à découvrir, cet ouvrage de René Guitton, remarquablement documenté, lance néanmoins un gros pavé dans la mare avec cette requête, qui selon lui, serait des plus révélatrices : faire l’autopsie des crânes des moines. Aucun doute ne subsisterait puisque l’on identifierait clairement le type d’arme utilisé contre eux, de même que la date précise de leur mort, ainsi que d’autres détails précieux pour une enquête de cette envergure.

L’auteur nous livre même les schémas d’un rapport préliminaire d’examen des crânes, d’après des photographies, ainsi que les conclusions des experts, comme autant de preuves tangibles qui justifieraient la réouverture de l’enquête. Une hypothèse s’échafaude, des balles tirées d’hélicoptère auraient pu être fatales aux moines. Mais qui a pu tirer ? Encore une fois, seule une autopsie pourrait apporter un semblant de réponse. Tel est d’ailleurs le souhait de l’auteur à la fin de son témoignage.

Les tensions qui demeurent entre la France et l’Algérie depuis cinquante ans, exacerbées actuellement par un contexte diplomatique particulièrement délicat en Afrique du Nord, sont pourtant loin de participer à la réalisation d’un tel projet. Revenant avec une infinie tendresse au début de son livre sur son enfance au Maroc, où se mêlaient dans une harmonie générale Chrétiens, Juifs et Musulmans, où chaque religion inspirait l’autre et la respectait, René Guitton cherche à nous montrer qu’une telle fraternité n’est pas impossible.

Au-delà de l’enquête, fouillée, passionnante, généreuse, qui revient avec force détails sur les évènements terribles de « l’Algérie des années de braise » ou de la « décennie noire » comme l’ont surnommée les médias – René Guitton nous rappelle notamment le meurtre de l’évêque d’Oran qui avait ému des deux côtés de la Méditerranée – ce livre est un véritable plaidoyer à la vérité. Pour qu’elle soit faite en mémoire des moines, et aussi en mémoire de tous les morts de cette tragédie sans nom.

L’une des phrases choisies par l’auteur en exergue de son livre est une citation du Prix Nobel Elie Wiesel, qui se prête tout particulièrement à cette émouvante affaire : « Le silence encourage celui qui persécute, jamais celui qui est persécuté« . La meilleure façon de faire enfin la lumière sur le martyre des moines de Tibhirine est donc d’en parler, souhaitons qu’avec son témoignage, René Guitton ait ouvert une irrépressible brèche vers la vérité et la justice.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 352
Editeur : Calmann-Lévy
Collection : Documents, Actualités, Société
Sortie : 16 mars 2011
Prix : 21,50 €