Dancing with Clara – Avis +

Résumé

Miss Clara Danford had no illusions about Frederick Sullivan. She knew that this handsome man was a rake whose women were legion and whose gambling debts were staggering. When he proposed marriage to her, she knew that he was in love with her fortune, and not with her.

Avis de Marnie

L’originalité du sujet est ce qui m’a attiré vers ce roman. Franchement je n’ai pas été déçue. Clara Danford est une riche héritière, seulement elle est paralysée, maigre et laide. Frederick Sullivan (le méchant du précédent roman de Mary Balogh, Courting Julia) est ruiné. Son seul moyen de s’en sortir financièrement, c’est d’épouser une femme riche.

Si le cheminement de la pensée de Clara est, somme toute, classique, la jeune femme apparaît surtout très émouvante. Si elle semble tout d’abord décidée, même culottée, en fait, c’est une aristocrate du 19ème siècle, qui a été conditionnée pour obéir, tout d’abord à son père, puis ensuite à son mari, sans discuter, prête à accepter… l’inacceptable. Femme de son temps, elle admet sans sourciller que son mari ne l’aime pas, et surtout qu’il puisse la tromper. Mais si elle l’accepte, l’auteur décrit avec beaucoup de sensibilité et de finesse ses failures, ses blessures. Digne, courageuse et profondément solitaire, bien qu’elle soit entourés d’amis chaleureux et dévoués, c’est une héroïne d’une délicatesse toute en contraste : douce et forte, d’une fragilité maladive dissimulant un caractère d’une solidité à toute épreuve, pleine de retenue alors qu’elle se montre passionnée dans l’intimité, enjouée et souriante en façade alors qu’elle s’étiole du manque d’amour…

Frederick est lui, beaucoup plus original, dans le sens où, odieux dans le livre précédent, il apparaît comme l’anti-héros. S’il est beau et séduisant, les premières impressions que le lecteur aura de lui sont négatives : il a perdu toute sa fortune au jeu, est prêt à épouser n’importe quelle femme qui se présenterait. Chasseur de dot sans aucun scrupule, il demande Clara en mariage en lui disant qu’il est amoureux d’elle, tout en la considérant comme une paraplégique souffreteuse, laide et insignifiante, avec comme tout sentiment un tragique : comme on fait son lit, on se couche. Mais ses sentiments vont évoluer. Tout d’abord, il est presque tétanisé à l’idée de la toucher, mais rapidement, souhaite la protéger et lui apporter des moments de joie dans cette vie trop étriquée. Puis, peu à peu, c’est un autre héros qui se révèle. Pourquoi joue t-il ? Pourquoi va t-il de femme en femme, sans but dans l’existence ? Pourquoi sa vie est-elle si vide de sens ? Ce sont les relations qu’il noue avec sa femme qui vont soudain le faire réfléchir sur lui-même.

En fait, c’est cette introspection qui rend ce livre si intéressant. Frederick découvre sa femme, mais s’interroge aussi et réalise qu’elle lui est supérieure en tout. Le lecteur accompagne l’évolution des pensées et des sentiments des deux jeunes gens. Il y a peu de dialogues, si bien que certaines scènes interviennent avec une force presque choquante. Ainsi, j’ai été presque gênée au début quand Frederick oppose à tous les intervenants horrifiés par ce mariage et qui défilent les uns après les autres, un : je suis amoureux d’elle, d’un ton tragique qui cloue le bec à tout le monde mais que personne ne croit… et lorsqu’il réitère ses déclarations d’amour à son épouse, Clara ne répond pas… c’est poignant !

Cette tension culminera dans une scène d’explication où l’héroïne qui voulait seulement un beau et vigoureux mari, souhaite soudain ce qui lui semble inaccessible, son amour, et lui jette quelques vérités au visage. Frederick se retrouvera face à ses propres manquements, se verra à travers les yeux bien ouverts de son épouse, et détestera ce qu’il découvrira. Commence un autre livre, ou le jeune homme, replonge dans ses vieux démons, et après s’être de nouveau perdu dans des plaisirs faciles, se cherchera dans de longues scènes de réflexion. Est-ce le passé qui en a fait ce qu’il est ? Quel homme est-il aux yeux des siens ? Peut-il changer ? De son côté, Clara réalise qu’elle doit pouvoir trouver la force en elle pour s’épanouir, et non plus compter sur ce que peuvent lui apporter son mari, ou ses amis.

Les deux personnages principaux sont si envahissants qu’on en oublierait les seconds rôles pourtant bien attachants, telle Harriet, fille de bonne famille devenue dame de compagnie de Clara, et qui la protège comme une lionne, ou encore le meilleur ami de Frederick, Archibald, duc très riche qui s’amuse à la courtiser et se prendra au jeu… mais seulement jusqu’à un certain point, ou encore Julia, héroïne du précédent roman, les parents de Frederick…

Tout cela pourrait paraître long, mais en fait, absolument pas. Si l’on excepte quelques petites facilités de l’intrigue, ce récit est écrit avec finesse, sensibilité, une fluidité très agréable, qui favorise l’introspection des deux personnages. Leur transformation mutuelle est passionnante, profonde, très émouvante… mais parsemés de dialogues légers dotés d’un humour discret. En fait, le style est élégant, et très anglais… je défie quiconque de ne pas être touché par ce roman délicieux et abouti.

Fiche Technique

Langue : anglais
Format : poche
Page : 224
Editeur : Signet
Sortie : 1er février 1994
Prix : épuisé