Ressources inhumaines – Avis +/-

Présentation de l’éditeur

« La vie d un hypermarché bat au rythme de l’humanité manipulée.
Et cela fait vingt ans qu elle participe à cette manipulation. »

Elle attend et n’exige rien du destin. Elle laisse glisser les heures, elle ne participe pas, elle est là, peu influente, jamais déterminante et sans rancune. Elle est en parallèle, attentive, mais pas impliquée.

« Elle », c est cette jeune femme de 22 ans qui entre comme stagiaire au rayon textile d un hypermarché, pour y devenir très vite chef de secteur. C’est cette « femme sans qualité » dénuée d ambition, qui cherche juste à combler le vide abyssal de sa vie. En acquérant un statut, elle quitte les rives de son existence banale pour faire enfin partie d’un monde. Celui de la grande distribution. Univers absurde, construit sur le vide et les faux-semblants.

Avis d’Emilie

Ce roman nous emmène sur des rives mystérieuses dont la plupart d’entre nous ne connaissent que le paysage : le monde des hypermarchés. C’est dans un établissement de 15 000 mètres carrés que notre héroïne, qu’on ne connaîtra que sous le pronom « elle », deviendra stagiaire, puis chef de rayon et enfin chef de secteur.

Une ascension fulgurante et surprenante au vu de son inexpérience et de sa banalité. Rien ne la démarque. Elle a parfois un éclat d’intelligence, elle est plutôt jolie, mais ne possède absolument pas les compétences requises et ce vide la hante. De peur d’être découverte, elle se compose un personnage, qui va peu à peu la dévorer. Surtout quand elle va tomber amoureuse…

La narration est assez étrange. En effet, la plupart des personnages ne portent pas de patronyme. L’héroïne dont on suit la vie est appelée « elle ». Son amoureux, s’appellera « il ». Seuls quelques élus ont droit à un nom. Non pas que une dénomination personnelle eussent changé grand chose à l’histoire, mais cela aurait peut-être allégé le style.

Presque 300 pages de « elle » et « il » à la suite, qui nous perdent un peu, nous autres lecteurs, et deviennent vite rébarbatifs. Impossible toutefois de ne pas y voir une métaphore avec le travail en supermarché qui aliène l’humanité des ses employés et est, lui aussi, répétitif.

La première partie du roman – qui nous explique les rouages d’un hypermarché et les promotions successives de notre stagiaire – est très intéressante et passionnante. Entre rebondissements imprévus, situations ubuesques et anecdotes savoureuses, on dévore ce récit avec un curiosité presque malsaine.

On se prend au jeu des manipulations des chefs et des coups bas entre collègues. La guerre des secteurs est limite sectaire, et prend régulièrement une tournure religieuse. Impossible de ne pas s’identifier, de ne pas se demander ce qu’on aurait fait. Et force est de constater que nous ne sommes pas si loin des personnages odieux qui peuplent les pages.

La seconde partie du livre est consacrée à la descente aux enfers de notre héroïne. Elle prend peu à peu conscience que son travail ne lui a pas apporté ce qu’elle espérait et qu’elle est toujours aussi vide qu’il y a 20 ans. Son masque se fendille avec l’arrivée d’un nouveau chef de rayon dont elle tombe amoureuse. A partir de ce moment, le livre devient très très long. On se perd en réflexions philosophique sur l’utilité du travail, de l’amour, de la vie en général, et le récit construit et dynamique du début laisse place à un marasme sociologique et psychanalytique qui ne progresse pas, et la fin est sans surprise.

Dommage pour un livre qui possède toutes les qualités pour plaire au début. On passe toutefois un bon moment, ne boudons pas notre plaisir.

Fiche technique

Format : broché

Pages : 288

Éditeur : Albin Michel

Collection : Romans français

Sortie :20 août 2015

Prix : 19 €