La fabrique des filles – Avis +

Présentation de l’éditeur

« On ne naît pas femme, on le devient ». Des leçons de broderie aux cours d’éducation sexuelle, le XXe siècle est porteur d’une évolution, à la fois spectaculaire et paradoxale, de l’éducation des filles, naviguant entre l’enseignement d’un éternel féminin et une émancipation durement conquise. Cet ouvrage richement illustré met en scène ce cheminement à travers 200 documents souvent inédits : journaux intimes, cahiers d’élèves, courrier du cœur…

L’engagement d’institutrices pionnières, les revendications de la jeunesse et la révolte de féministes enrayeront le dispositif éducatif, à l’école comme à la maison, pour fabriquer des épouses et des mères modèles.

Avis de Marnie

Est-ce que nous sommes seulement le produit de notre éducation ? L’enseignement que l’école nous a donné, a-t-il devancé les grands changements sociaux, l’a-t-il suivi ou subi ? Rebecca Rogers et Françoise Thébaud, toutes deux professeurs d’histoire, nous racontent l’évolution de l’éducation faite « aux filles » de Jules Ferry à la pilule… soit le siècle qui a abouti à l’émancipation, de la création des lycées de filles jusqu’à la mixité à l’école. Surtout ne vous attendez pas à une analyse aussi lourde que didactique ! Au contraire, cette chronologie est aussi ludique qu’instructive, avec assez d’indications pour nous permettre de remettre en cause notre propre réflexion sur l’éducation que nous avons reçue.

Les courts textes expliquent ou soulignent les photos de jeunes filles vêtues de blouses, établissements laïques ou religieux, lycéennes qui au départ ne sont que de jeunes bourgeoises destinées à être essentiellement épouses et mères. Qu’offre-t-on suivant les années au petites filles pour jouer ? Des dinettes bien-sur, même des petits fer à repasser !

Nous sourions devant ces images d’un passé pas si lointain que cela, alors que plus sérieusement, au fil des pages, des visages féminins célèbres révolutionnent le siècle, institutrices militantes pacifistes convaincues, une enseignante ayant pour nom Simone de Beauvoir…

De stéréotypes en véritables règles sociales, voici les bandes dessinées pour filles du début du siècle, la lecture des Malheurs de Sophie, l’évolution du journal intime, les poésies qui glorifient le calme du foyer, ouvrages de couture et de broderie, articles de journaux, références de romans, extraits de cours, alors que la guerre repousse l’image paternelle loin de sa maison et que les mères se mettent au travail. Peu à peu, des écoles spécialisées font leur apparition. Pigier, vous connaissez ?

Chacune y trouvera son intérêt… l’éducation de sa grand-mère, de sa mère, de sa fille, de petits détails en grands bouleversements. Une quadragénaire comme moi se souvient soudain en regardant la pochette de certains livres de la fin des années 50, à la petite collégienne danoise, Puck (collection Rouge et Or) à Fantomette ou autres livres de la bibliothèque rose et verte, de l’année où soudain, les blouses n’étaient plus obligatoire, ou encore quand nous nous sommes retrouvées avec des garçons dans la classe, en nous remémorant notre première poupée Barbie, où Sheila qui chantait Petite fille de français moyen et aspirait dans tous ses textes à trouver le « bon » garçon avec qui elle se marierait et aurait des enfants.

Cet essai, même s’il se lit comme un roman, est aussi sérieux… que délicieux. Les auteurs savent aussi bien analyser leur sujet de prédilection qu’elles transforment en étude sociologique mettant l’accent sur le conditionnement intellectuel et culturel, que jouer en souriant avec notre propre nostalgie. A déguster en famille, en une soirée, ou tranquillement par petites touches… et à garder pour montrer plus tard à vos filles !

Fiche Technique

Format : relié
Pages : 159
Editeur : Textuel
Collection : Hors collection
Sortie : 6 octobre 2010
Prix : 35 €