Perte et fracas – Avis +

Présentation de l’éditeur

Doug a 29 ans et il est veuf. Depuis deux ans. Depuis que l’avion dans lequel voyageait Hailey a explosé en plein vol. Et depuis, Doug se noie dans l’auto-apitoiement comme dans le Jack Daniel’s… Jusqu’à ce que sa petite famille débarque en force. Son beau-fils, Russ, en conflit avec l’humanité entière. Sa jumelle, enceinte, qui décide de s’installer chez lui. Et sa plus jeune sœur, qui s’apprête à épouser l’ex-meilleur ami de Doug… rencontré à l’enterrement de Hailey !

Sans oublier son père, qui commence à perdre la tête et lui demande régulièrement des nouvelles de sa femme, ou encore sa voisine qui s’obstine à lui susurrer des mots cochons à l’oreille… Et que dire de ses allures d’écrivain ténébreux qui lui attirent les faveurs de la gent féminine et des grands éditeurs, grâce à sa chronique hebdomadaire  » Comment parler à un veuf  » qui a fait de lui une star ! Qu’il le veuille ou non, plus question de se couper des autres. Pourtant, ce n’est que lorsque Russ est précipité dans les pires ennuis que Doug reprend réellement les choses en main. Et son retour à la vie ne se fera pas sans perte et fracas…

Avis d’Enora

Perte et fracas nous permet de retrouver Jonathan Tropper au mieux de sa forme ou plutôt de son style !

Cela fait un an que Doug a perdu sa femme, son envie de vivre et sa foi en Dieu… puisque la mort d’Hailey est pour lui le signe que Dieu lui adresse pour lui dire qu’Il n’existe pas! Sa famille et ses proches ont l’air de penser que c’est la durée de péremption d’un deuil et qu’il est temps de tourner la page. Mais Doug est devenu très possessif de sa douleur qu’il ne veut partager avec personne. Comme lui dira son amie Brooke, il veille sur son chagrin avec jalousie et presque avec fierté et aime à penser que personne n’a jamais souffert autant que lui. En réalité Doug culpabilise car la mort d’Hailey a modifié le destin : c’est au cours de l’enterrement que sa petite sœur a rencontré l’homme de sa vie ; les chroniques qu’il publie «Comment parler à un veuf» lui ouvrent les portes des plus grandes maisons d’édition qui jusqu’alors le rejetaient ; le chèque de dédommagement de la compagnie aérienne fait de lui un homme riche. La célébrité, la richesse, le fait qu’il puisse enfin se consacrer à sa passion, l’écriture, lui ouvrent la perspective d’une vie agréable et cela il ne peut l’accepter : il a peur qu’un jour il ne désire plus faire remonter le temps pour sauver Hailey. Heureusement sa famille ne va plus lui laisser le loisir de penser ou de s’apitoyer. Entre sa mère qui veut absolument le remarier, son beau-fils qui veut revenir vivre avec lui et sa sœur jumelle qui quitte son mari et emménage chez lui, Doug n’a plus un moment à lui.

Tropper désamorce avec humour la gravité de l’histoire et dresse avec tendresse, les portraits de tous les personnages qui gravitent autour de Doug : sa mère qui en parfaite mère juive régente et soutient tout sa petite famille mais qui souffre en silence de la perte progressive de mémoire de son mari «Tu as perdu ta femme, Doug, j’en suis malade pour toi, vraiment. Mais je perds mon mari tous les jours, encore et encore. Et je ne peux même pas faire mon deuil»; Russ le beau-fils, aussi malheureux, rageur, paumé et solitaire que Doug depuis la mort de sa mère; la jumelle Claire, petite bonne femme sarcastique, au bon sens dévastateur «Les premières fois que tu coucheras avec une femme, ce sera la cata. C’est comme si tu étais redevenu puceau, vu le passif que tu trimballes. Tu auras du mal à bander, ou bien tu jouiras trop vite, ou pas du tout, et tu seras déprimé juste après».

Il y a des scènes hilarantes comme la confrontation toute en non-dit entre Doug et l’ex-mari de sa femme et d’autres qui émeuvent jusqu’aux larmes, comme le moment où le père de Doug dans un de ses rares moments de lucidité comprenant enfin qu’Hailey est morte, berce son fils en s’excusant de ne pas avoir été là pour lui et permet ainsi à Doug de pleurer pour la première fois depuis treize mois.

L’auteur parvient à écrire autour d’un sujet douloureux avec pudeur et réalisme. La drôlerie sans lourdeur des personnages et des situations, son sens des formules (qui n’est pas sans faire penser à Woody Allen), mêlés à l’humour plein d’autodérision du narrateur font de ce roman, une subtile leçon de vie et le plus réussi des livres de Jonathan Tropper.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 369
Editeur : Fleuve Noir
Sortie : 9 janvier 2008
Prix : 19 €