Tableaux d’une exposition – Avis +

Présentation de l’éditeur

Par une belle journée d’hiver, Rachel Kelly s’écroule dans son atelier. Cette peintre renommée laisse derrière elle une œuvre impressionnante et une famille déchirée. Un homme, d’abord, Antony, qui fut son compagnon, son soutien, son souffre-douleur aussi, quand ses crises dépressives étaient trop fortes ; deux fils qui ne se sont jamais sentis à la hauteur de cette mère trop douée, trop passionnée, trop vivante ; une fille, Morwenna, qui a choisi de fuir…

Comment les liens qui les unissaient se sont-ils distendus ? Qui était vraiment cette artiste de génie, gravement malade, qui a toujours fait passer l’art avant tout ? Pourquoi la fragile Morwenna a-t-elle soudain rompu avec ses parents ? Qu’est-il arrivé à Petroc, le petit dernier, le fils préféré, disparu trop tôt ? Quels secrets les tableaux de Rachel Kelly ont-ils encore à livrer ?

Avis d’Enora

Rachel Kelly, peintre de renom, est retrouvée sans vie dans son atelier des Cornouailles. Autour ou au loin de cette femme bipolaire, chacun avait organisé sa vie ; Antony son mari, Garfield, Hedley, Morwenna et Petroc ses enfants. Sa disparition, tel un séisme, va faire remonter un certain nombre de secrets de famille.

Rachel était une femme au passé mystérieux, dont le talent de peintre ne s’exprimait jamais mieux que dans les phases maniaques de sa maladie, tandis que les retombées dépressives la poussaient régulièrement à attenter à ses jours.

La psychose du post-partum qui l’envahissait après ses accouchements a entraîné des troubles de l’attachement et une disharmonie interactive avec ses enfants. Ceux-ci la craignent tout en la protégeant, l’aiment tout en la haïssant et vivent dans la crainte de ses récurrents changements d’humeur.

Certains s’interdiront de devenir parents, d’autres trouveront dans la drogue, le renoncement, la fuite ou la mort, une façon d’échapper à cette mère prédatrice. Sa mort, en libérant la parole et les non-dits, fera sauter les murs de l’enfermement construit par la maladie et offrira à ceux qui restent, l’opportunité d’exister enfin.

L’art est au centre du roman. La création permettant à Rachel de structurer son espace intérieur, de donner sens à ses émotions, de maintenir le lien familial et social et de canaliser la jouissance mortifère, comme de nombreux créateurs artistiques aux structures psychotiques, tels Artaud, Joyce, Bacon ou Nijinski.

La religion tient aussi une place importante, sorte de ciment familial : Antony est quaker et dans cette communauté qui fait fi de toute hypocrisie, on a l’habitude d’accorder à chaque chose et à chaque personne sa juste importance.

Le livre est construit comme une exposition posthume : chaque chapitre commence par le cartel d’une œuvre de Rachel Kelly et se continue par une anecdote, une tranche de vie ou des réflexions de tel ou tel personnage, en lien avec le tableau. Cette construction remarquable permet une étude psychologique complexe de tous les protagonistes et de leurs interactions.

Patrick Gale réalise ici un magnifique roman – qui n’est pas sans résonances personnelles – dont la construction originale lui permet de se glisser avec finesse dans l’âme de ses personnages, naufragés de non-dits et de tempêtes intérieures.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 414
Editeur : 10/18
Collection : Domaine étranger
Sortie : 16 septembre 2010
Prix : 8,60 €