Le Ravissement de Britney Spears – Avis +

À quiconque mettrait en doute a priori la vraisemblance des menaces d’enlèvement ou d’assassinat pesant sur la chanteuse, j’objecterais qu’il n’est guère plus absurde de s’en prendre à Britney Spears qu’aux tours du World Trade Center, et que la valeur symbolique de la première, aux yeux du public américain, est à peine moindre que celle des secondes.

Alerte rouge ! Al Qaïda attaque ! Leur objectif : Britney Spears !

Les voies des indics étant impénétrables, les services secrets français, les meilleurs du monde… mais si !, ont été averti avant leurs homologues de la C.I.A. Aussi ils délèguent sur place leur meilleur barbouze… ou plutôt celui qui était disponible.

Le choix paraît curieux. Non seulement le candidat désigné d’office ignore tout du show-biz, mais en plus il se fait remarquer par sa propension à fumer dans les lieux publics. Accessoirement précisons qu’il ne sait pas conduire. Où se trouve Lino Ventura quand on a besoin de lui ?

Ce héros mélancolique a atterri à Los Angeles et à présent il erre de Sunset Boulevard à Rodéo Drive cherchant à déjouer les plans des forces du mal. Comment se renseigner sur la cible qu’il doit protéger ? Mais tout simplement en s’adressant à ceux qui la connaissent le mieux, ceux qui la traquaient bien avant les terroristes islamistes : la noble institution des paparazzis.

Adepte des opérations commandos ou de la savante embuscade, ces guerriers des temps modernes s’efforcent de dérober une image qui améliorera leur fin de mois, tout en affichant un professionnalisme ou un enthousiasme exubérant :

« No underwear !  » et il sautait partout, comme hors de lui, avec l’expression d’un enfant qui vient de surprendre ses parents en train de copuler, recherchant l’approbation des passants qui tour à tour, invités à se pencher sur l’appareil, certains devant chausser leurs lunettes pour voir d’aussi près, s’efforçaient dans le peu de temps dont ils disposaient de distinguer entre les jambes de Britney la preuve manifeste de cette absence de culotte.

Ce roman d’espionnage se double d’une étude ethnologique des stars et de leurs parasites, mais également d’une analyse géopolitique pertinente :

Du point de vue de ses instigateurs, un attentat contre Britney Spears, ou contre toute autre star hollywoodienne, présentait sur la destruction des tours l’avantage de mettre à genoux, durablement l’industrie américaine du spectacle.

Mais la véritable vedette semble être la ville elle-même. Régulièrement ravagée par des tremblements de terre ou des émeutes elle poursuit néanmoins son développement pour des raisons apparemment aberrantes, mais bien réelles :
« Les chiens ont joué un rôle extraordinairement important dans le développement résidentiel de Downtown déclarait dans le Los Angeles Times le président d’une association de propriétaire.

Chronique de l’absurde avec un clin d’œil à l’œuvre de Marguerite Duras[[cf. le roman de Duras Le ravissement de Lol V. Stein (1964)]], cet ouvrage démontre le talent de Jean Rolin dans sa description des univers fragiles décrits avec un sarcasme tranquille.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 284
Editeur : POL
Collection : Fiction
Sortie : 25 août 2011
Prix : 17 €