Roméo et Juliette – Avis –

Présentation officielle

Quelle pièce est aussi célèbre et pourtant aussi peu connue ! Sa dernière mise en scène à l’Odéon remonte à 1971 – et d’ailleurs, depuis le début du XIXe siècle, l’intervalle moyen entre deux productions est d’une quarantaine d’années.

Comment expliquer cette discordance entre la réputation d’une œuvre qui compte parmi les sommets incontestés du répertoire shakespearien et sa rareté sur notre scène ?

Elle s’explique en partie, sans doute, par des questions d’ordre purement matériel : le drame des amants de Vérone comprend une distribution importante, de nombreux figurants, des décors à effet, une fête somptueuse dès le premier acte.

Mais on pourrait en dire autant d’autres pièces de Shakespeare. D’autres raisons doivent avoir joué : entre l’auteur et notre regard, le romantisme et l’opéra sont venus se glisser, contribuant peut-être à imposer à notre imaginaire collectif le cliché réducteur et kitsch qui fait de Roméo et Juliette un simple fait divers amoureux mélodramatique, une belle histoire triste et un peu superficielle transfigurée par la grâce d’un verbe magicien.

Olivier Py, pour sa part, vient à Shakespeare sans idées préconçues. Et comme il a récemment mis en scène, aux Pays-Bas, le Roméo et Juliette de Gounod dirigé par Marc Minkowski, il est revenu au texte original pour y chercher autre chose, justement, que ce que l’opéra semble en avoir retenu.

Une conviction s’est alors imposée à lui : s’ils s’aiment, ces deux amants sublimes, c’est parce que leur amour est impossible. Ce n’est pas malgré le monde, la société, les préjugés, l’hostilité entre leurs deux familles ou leurs propres penchants qu’éclate le coup de foudre – c’est bien plutôt à cause de tous ces obstacles.

C’est comme si tout se déchirait, tous les garde-fous, tous les filets composant ce qu’on appelle le monde – et dans la béance de ce déchirement s’ouvre la liberté vertigineuse du monde vrai, celui que les amants délivrent l’un pour l’autre.

Pour sa première approche d’un maître qu’il admire entre tous, Olivier Py travaille lui-même à une version ramassée qui réinvente l’énergie percutante et elliptique, le flamboyant état d’urgence de la grande langue shakespearienne.

La traduction d’Olivier Py est parue chez Actes Sud-Papiers, en septembre 2011.

Avis de Claire

Rendez-vous raté pour Olivier Py et son dernier spectacle mis en scène à l’Odéon. Directeur sortant, il part en effet sur une fausse note. Présentée pour la dernière fois en 1971 au théâtre de l’Odéon, cette pièce-phare dans l’oeuvre de Shakespeare souffre ici, dans sa version 2011, d’une réécriture que l’on qualifiera pudiquement de « trop moderne ».

Mais en réalité, là où d’aucuns y verront une audace, une originalité toute pruderie retenue, nous n’y voyons que vulgarité et manque de charme. Là où certains s’extasieront devant des décors épurés, des comédiens dénués de mièvrerie, nous n’y voyons que manque d’originalité et affront au romantisme.

Les acteurs, dont on nous vante qu’ils sont jeunes, qu’ils ont « presque » l’âge du rôle (ce qui est très exagéré tout de même, ces héros sont en fait de véritables enfants, puisqu’il est dit que Juliette n’a pas quatorze ans), ne sont pas en osmose, impossible de croire à leur amour incendiaire.

Le jeu des pseudo-amoureux (Matthieu Dessertine et Camille Cobbi) sonne donc faux. Rares sont ceux qui se distinguent de toutes façons. Saluons toutefois l’interprétation remarquable de Barthélémy Meridjen, qui, comme quelques autres, joue plusieurs rôles, ainsi que celle de Benjamin Lavernhe en Benvolio, toujours justes.

Trop de modernité tue la modernité. Ne restent de ce décevant spectacle qu’un sentiment de malaise et l’impression d’avoir assisté à une piètre farce où le mauvais goût rivalise avec la vulgarité. Ni paillardise ni nouveauté, ni flamboyance ni raffinement, cette pièce est une véritable déception.

Fiche technique

Tournée saison 2011 / 2012 :
Du 3 au 10 novembre 2011 – Comédie de Saint – Etienne
Du 15 au 17 novembre 2011 – La coursive, La Rochelle
Du 22 novembre au 10 décembre 2011 – TNS, Strasbourg
Du 14 au 17 décembre 2011 – Comédie de Caen
Du 21 et 22 décembre 2011 Schauspielhaus Zurich
Du 6 au 13 janvier 2012 – TNP, Villeurbanne
Du 17 au 26 janvier 2012 – Le Grand T, Nantes
Du 31 janvier au 2 février – Maison de la Culture de Bourges
Du 7 au 9 février 2012 – Maison de la culture d’Amiens
Du 14 au 17 février 2012 – Comédie de Reims
Du 22 et 23 février 2012- La Comète, Châlons en Champagne
Du 29 février et 1er mars – Théâtre de Cornouailles, Quimper
Du 7 au 9 mars 2012- Comédie de Valence
Du 13 au 15 mars 2012 – Comédie de Clermont-Ferrand
Du 20 au 23 mars 2012- Le Quartz de Brest
Du 4 et 5vril 2012- Théâtre Musical de Besançon
Du 10 au 13 avril 2012 – Théâtre Liberté de Toulon
Du 18 et 19 avril 2012 – Théâtre de Louviers, Scène Nationale D’Evreux
Du 25 au 28 avril 2012 – TNT, Toulouse
Du 16 au 19 mai 2012- TNN, Nice
Du 26 et 27 mai 2012 – Festival d’Istanbul