Vox – Avis +

Présentation de l’éditeur

Jean McClellan est docteure en neurosciences. Elle a passé sa vie dans un laboratoire de recherches, loin des mouvements protestataires qui ont enflammé son pays.

Mais, désormais, même si elle le voulait, impossible de s’exprimer : comme toutes les femmes, elle est condamnée à un silence forcé, limitée à un quota de 100 mots par jour. En effet, le nouveau gouvernement en place, constitué d’un groupe fondamentaliste, a décidé d’abattre la figure de la femme moderne.

Pourtant, quand le frère du Président fait une attaque, Jean est appelée à la rescousse. La récompense ? La possibilité de s’affranchir – et sa fille avec elle – de son quota de mots. Mais ce qu’elle va découvrir alors qu’elle recouvre la parole pourrait bien la laisser définitivement sans voix…

Avis de Claire

Il y a quelques mois encore, Jean McClellan était docteur en neurosciences, spécialiste d’une zone très particulière du cerveau, l’aire de Wernicke, responsable en cas de dysfonctionnement, de troubles du langage et d’aphasie. Elle l’est toujours d’ailleurs, officiellement, docteur, sauf qu’elle n’a quasiment plus le droit de parler. A son poignet, un « bracelet » argenté, un compteur de mots. En tant que femme, elle n’a le droit qu’à 100 mots par jour. Pas un de plus. En cas de désobéissance, une décharge électrique, à la puissance exponentielle.

Dans son pays, les Etats-Unis, les femmes ont peu à peu perdu leurs libertés. Cela s’est passé presque en douceur, progressivement, les fondamentalistes gagnant du terrain à chaque élection, à chaque discussion au sénat ou à la chambre du Congrès. Puis le nouveau président, secondé par un révérend belliqueux, n’a pas trouvé mieux que de préconiser le retour des femmes vers leur foyer, pour éradiquer le chômage, pour ramener le calme dans les maisons, dans les familles américaines typiques.

Cela vous semble familier ? Alors bien évidemment, on pense à La Servante écarlate (1985), où la Canadienne Margaret Atwood mettait en scène une dystopie effrayante à partir d’événements historiques ayant existé. L’Américaine Christina Dalcher, quant à elle, contextualise son propos dans un pays qui ressemble furieusement à son Amérique actuelle. Les femmes ont fait des marches à Washington après l’élection, il y a un mur entre Etats-Unis et Mexique, les hommes décident du corps des femmes… Les ressemblances sont nombreuses. Et elle n’hésite pas à aller au bout de l’horreur.

La première partie du roman met en place une machinerie terrifiante, qui emprunte aussi bien à George Orwell qu’à William Styron. Mais le récit s’entache d’une intrigue amoureuse secondaire, qui sert surtout à ralentir l’action, et qui provoque une fin plutôt précipitée, quelque part pas assez à la hauteur de l’implacable scénario que laissait présager le début de l’histoire. De la dystopie, on passe petit à petit à un thriller, haletant, certes, mais qui manque de consistance.

Il n’en reste pas moins que Vox marque les esprits, tant par la virulence de son sujet que par la qualité d’écriture de son autrice, docteure en neurosciences, dont c’est le premier roman.

Avis d’Emmanuelle

La première partie du roman n’est pas sans rappeler La Servante écarlate, de Margaret Atwood, où des intégristes religieux qui ont la main mise sur le pouvoir ôtent toute liberté aux femmes. Tout le monde est surveillé, des caméras filment les moindres manquements aux règles, et la sanction est immédiate et violente.

La force de cette histoire réside cette fois-ci dans les connaissances de son auteur, Christina Dalcher, docteur en neurolinguistique. Les épisodes détaillant les travaux scientifiques de l’héroïne sont riches d’enseignement, et donnent une certaine réalité au récit. Les chapitres s’enchaînent à une vitesse folle, et l’on se prend à espérer un dénouement heureux, après une introduction des plus dures.

La lecture est immersive, même si les scènes ne s’enchaînent pas de manière très fluide. Il n’y a pas de transition entre deux paragraphes, les situations se suivent de manière abrupte… (peut-être ont-elles été écrites par morceaux, dans le désordre ?).

Le charme de l’héroïne tient à son franc-parler (ou plutôt à son « franc-penser »), qui donne la part belle aux expressions imagées, quelques fois vulgaires. Cela offre au lecteur la possibilité de s’identifier à cette femme qui est loin des clichés parfaits et insipides de beaucoup de livres de ce genre.

En conclusion, Vox est un très bon livre d’anticipation dystopique, même si les râleurs croiront y voir une pâle copie de La Servante écarlate. La possibilité de dérive dictatoriale des gouvernements est telle qu’on est loin d’avoir exploré tout le potentiel littéraire qui s’en inspirerait…

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 432
Éditeur : Nil
Sortie : 7 mars 2019
Prix : 22 €