Une fois encore : Mémoires – Avis +

Présentation de l’éditeur

Tout ceux qui ont vu Annie Hall ont vécu une histoire avec elle. On a aimé sa fraîcheur, on a copié son style, on se souvient de son humour, de ses coups de gueule ou de ses coups de blues. Devenu culte, ce film apparaît comme la déclaration d’amour du cinéaste à son actrice et ancienne compagne, Diane Keaton, qu’il révéla au public en même temps qu’à elle-même.

Contrairement à une idée fausse mais communément admise, Diane n’est pas la nièce de Buster Keaton – en dépit de son indéniable don pour la chose comique – mais l’aînée des quatre enfants de Dorothy Keaton et Jack Hall. Très vite, entre la mère et la fille, se noue une relation très forte, faite d’admiration, de projection et d’attente : la très belle Dorothy, ancienne Miss Los Angeles des femmes au foyer, voit en Diane une personne exceptionnelle, capable de réaliser tous ses rêves. C’est cette conviction profonde qui poussera la jeune fille à venir faire ses études de théâtre à New York puis devenir une actrice de renom international, côtoyant les plus grands et récompensée des plus prestigieuses distinctions…

A la mort de Dorothy, atteinte depuis des années de la maladie d’Alzheimer, Diane Keaton a retrouvé son journal, composé de quatre-vingt cinq carnets. Ces milliers de pages la révèlent comme une femme en butte au modèle d’épouse et de mère, cherchant comment exprimer toute la richesse de sa créativité et de son originalité. Plutôt que de composer ses Mémoires de manière conventionnelle, Diane Keaton a alors décidé d’écrire un récit qui les raconte toutes les deux, Dorothy et elle, mais aussi tous les membres de sa famille, ses frères et sœurs, son père, sa  » grammy Hall « , ses enfants. Cette histoire, qui s’étend sur quatre générations, nous parle d’elle et nous parle de nous, des liens qui nous unissent pour toujours à ceux que nous aimons le plus au monde…

Avis de Marnie

Diane Keaton s’est souvent présentée comme une excentrique. Sa façon non conventionnelle de rédiger ses mémoires en est une preuve de plus. Ainsi, si vous souhaitez retrouver Annie Hall, soit une Diane Keaton « rêvée » par celui qui n’était déjà plus son compagnon de l’époque, Woody Allen, vous serez certainement déçus.

De même, si vous pensez qu’il s’agit d’un recueil d’anecdotes concernant tournages, rencontres, acteurs… enfin les mémoires bien traditionnelles d’une actrice [[qui eut pour amants, trois stars dans leur genre, Woody Allen, Warren Beatty et Al Pacino]] en espérant que vous vous régalerez de détails croustillants sur la vie intime de tout ce petit monde… là encore, ce roman n’est pas pour vous.

Un roman ? En effet, Diane Keaton écrit une histoire, juxtaposant celle de sa mère et la sienne, comme un roman. Alors peut-être, vous laisserez vous captiver par ces deux parcours racontés par une femme de soixante-cinq ans qui observe son passé, ses relations avec ses proches pour mieux se comprendre.

La jeune Dianne Hall (le nom de son père, Keaton étant celui de sa mère, Dorothy) s’est fait de longues années, peut-être par aveuglement, une image idéalisée de sa famille. Impressions qui furent reprises en accentuant les effets drolatiques par Woody Allen dans Annie Hall.

Dorothy, née au Kansas (cela ne s’invente pas cette image du Magicien d’Oz) a été une mère et une épouse modèle, vivant essentiellement pour le bonheur des siens. Sa seule excentricité ? Se présenter dans des concours de meilleure femme au foyer.

Derrière cette image enjouée, lisse et compréhensive pleine d’empathie, s’est longtemps cachée une femme dépressive souffrant surtout de ne pas être reconnue en tant que femme. C’est la découverte de son journal intime qui va remettre en question les certitudes de sa fille aînée, qui de son côté, se cherche désespérément.

Là-encore, tout le monde a dans la tête le rire, l’assurance, la décontraction de Diane Keaton… ainsi la photo de la couverture semble le mieux résumer cette personnalité forte et pleine de confiance en soi.

La vraie surprise de ce livre, c’est que l’on n’imaginait pas à quel point cette femme emblématique qui lança une mode, est passée à côté de beaucoup de choses, à cause notamment de sa fragilité à fleur de peau et de son sentiment d’échec toujours présent.

Sa grande force, c’est son opiniâtreté, mais elle a choisi une vocation où l’on arrêtera jamais de la juger. Son premier écueil durera cinq ans… la boulimie. Comme pour mieux remonter la pente, se donner une vraie assurance, elle choisit comme compagnons de très fortes personnalités… et fuit alors.

Parallèlement, elle raconte la dynamique familiale, ses relations évolutives avec son frère, ses soeurs, et surtout ses parents, entrecoupant le récit d’anecdotes concernant les deux enfants qu’elle élève sans complexe, elle qui a adopté une fille et un garçon alors qu’elle avait dépassé la cinquantaine.

De réflexions en impressions, de questionnements en psychanalyses, émaillés de quelques rencontres décisives… son regard incisif tend à trouver des réponses à son mal être, sa solitude. Le soir où elle reçu un Oscar, ce n’est pas la gloire qu’elle savoure, mais le regard soudain âgé d’une Audrey Hepburn qu’elle voyait figée dans du papier glacé glamour… Ou celui amer de l’immense Richard Burton qui marmonne que lui, n’a jamais reçu la récompense suprême.

Cela résume peut-être ce roman, écrit dans un style vivant, plein d’une émotion palpable et chaleureuse telle que Diane Keaton apparaît toujours avec son sourire éclatant. Cependant, derrière ce récit transparait constamment une douceur mêlée d’amertume.

Pas d’ennemi, pas de grands amis… quelques clins d’oeil, des histoires d’amour inachevées, des tournages qui passent mais que l’on ne retient pas, un travail plaisant mais dans lequel elle ne s’épanouit pas… et soudain deux enfants qui l’obligent à attraper l’existence à bras le corps, à se ruer dans l’instant présent et enfin, enfin à vivre intensément.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 315
Editeur : Robert Laffont
Sortie : 15 novembre 2011
Prix : 21 €