Reportage : Manifestation anti-israélienne à Londres le 20 mai 2006

Sous la pluie battante, sur le chemin pour Trafalgar square, des militants donnaient des tracts pour protester contre ce qu’ils appellent « l’occupation de la Palestine ».

Nous en prîmes un, puis un second. Ce deuxième était surprenant car différent du premier dans la forme, mais pas dans le fond, indiquant qu’au moins deux associations faisaient des distributions. Arrivant sur la place où se tient fièrement le vainqueur de Napoléon, nous aperçûmes soudainement plusieurs personnes en keffieh dont le génotype indiquait pourtant une ascendance purement anglaise ce qui était perturbant de les voir enrubannées de la sorte dans un foulard noir et blanc. Nelson ne pouvait pas observer cela d’un air surpris puisque lui-même était voilé pour l’occasion – la voix officielle parlant de restauration. La vue de ces nombreux fichus en même temps que des diatribes anti-israéliennes, amplifiées par microphones et haut-parleurs interposés, acheva de nous rendre mal-à-l’aise.

Les slogans étaient évidemment toujours les mêmes et ne proposaient rien. Blâmer Israël permet d’haranguer la foule très facilement puisqu’il suffit de faire des phrases courtes, d’élever l’intonation à la fin de chaque sentence tout en levant un doigt au ciel. A cet instant la foule se doit de répondre par des sifflements, des cris, des insultes envers « l’ennemi ». Autre époque, autre lieu, mêmes techniques.
Blâmer et ne rien proposer est plus facile, évidemment, puisqu’on n’a pas à s’adresser à l’intellect mais uniquement à la partie animale du cerveau qui réagit généralement bien plus rapidement sans le filtre de la raison.

Dans les discours, il n’y avait évidemment aucune trace, aucune condamnation des attentats contre des civils israéliens. Il n’y avait pas non plus d’opprobres contre les terroristes qui se servent des enfants comme boucliers pour tirer leurs roquettes. Simplement la condamnation d’Israël qui en ripostant tue – et c’est terrible, il est vrai – ces enfants placés là par les leurs qui se servent d’eux y compris dans leur mort.

Nous n’avons rien entendu non plus contre les exactions commises par les musulmans envers les Palestiniens chrétiens. Que les femmes chrétiennes soient obligées de porter le voile et les familles de payer des impôts de protection, que treize maisons soient brûlées et les familles massacrées n’a pas l’air de choquer, ni de devoir être réprimandé. C’est ce qu’on appelle laver l’honneur. Ce n’est pas ce sang là qui peut laver.

Aucun mot non plus sur les détournements de fonds ou sur la guerre civile en préparation actuellement. Rien. Juste des appels au boycott comme un devoir. L’idée du boycott est intéressante car il faudrait voir si les Palestiniens soignés dans les hôpitaux israéliens seraient d’accord pour l’appliquer à la lettre. Ou si tous les musulmans étaient prêts à ne plus avoir de processeur Intel issu de la recherche israélienne, ni utiliser au final aucune connaissance issue d’un quelconque prix Nobel ou sociétés israéliens.

C’est pour ces raisons que nous n’avons pas respecté la minute de silence, ce qui me valut des regards outrés, d’autant que la vue de tous ces keffieh et ce silence me donnaient envie de mettre une kippa et de chanter l’Hatikvah. Il ne manquait plus que le journaliste m’accompagnant m’appelle pendant ce moment calme : « Daviid ! ».

En même temps d’autres se seraient retournés car, choses surprenantes, au milieu de tout ce chaos, des Juifs orthodoxes manifestaient eux aussi contre le sionisme. Ces membres de Neturei Karta soutenaient donc les différents intervenants par leurs présences et leurs pancartes ouvertement contre Israël. Ce qui est surprenant, entendons-nous bien, n’est pas qu’ils soient contre l’état d’Israël puisque ce dernier est issu à leur yeux du sionisme et qu’ils pensent que Dieu n’a pas besoin des hommes pour rétablir son Peuple en Terre Sainte. Non ce qui est étrange c’est qu’ils n’aient pas compris que si les anti-israéliens obtenaient ce qu’ils désirent à savoir la destruction d’Israël, leurs regards se tourneraient vers ce qui est pour eux la base du problème : les Juifs. Et ce n’est pas le maire de Londres qui me contredirait sur ce point. S’associer avec le diable parce qu’il semble d’accord avec nous n’est jamais la solution et c’est à un jeu très dangereux que ces orthodoxes jouent. Nous en avions les larmes aux yeux. Que ce soit avec Esther, Daniel, Néhémie, Joseph, Dieu s’est toujours servit des instances politiques humaines pour sauver ou restaurer son Peuple, à condition que ceux-ci ne se corrompent pas avec les idolâtres.

Le plus inquiétant au final n’est pas tant cette manifestation qui montre qu’au moins la liberté de parole existe en Occident, qui prouve que l’on peut insulter dans son pays son dirigeant sans être interpellé, que l’on peut organiser une manifestation de protestation. Non le plus inquiétant est de se dire que les manifestants ne voient que l’issue que certains veulent bien leur montrer et que les Occidentaux rentrent dans ce jeu par une culpabilité malsaine, par commisération excessive et sans volonté aucune de trouver une solution viable pour les deux peuples.

Mais tous ces gens qui pensent que Israël est un état raciste et pratiquant l’apartheid (mot nauséabond dont on sait bien ce qu’il sous-tend dans la tête de ceux qui l’associent à Israël), nous ne les voyons pas au Pakistan ou en Iran, une Bible à la main demander la libération des chrétiens condamnés à mort. Non ils préfèrent hurler avec les loups bien au chaud et critiquer Israël.