Mouettes, Remember me et parentalité : l’avis d’une mère de famille pas tout à fait désespérée

Il y a des films qui attirent un certain public et qu’on va voir par curiosité, parce qu’on aime bien l’acteur principal ou parce qu’on a lu deux ou trois bons retours à son sujet. C’est un peu pour toutes ces raisons que je me suis décidée à aller voir Remember Me, toute seule. Dans mon petit cinéma de quartier, les grandes salles sont réservées aux grosses productions. Place à Alice aux pays des merveilles ou Adèle Blanc-Sec, les autres se retrouvent relégués dans de toutes petites salles avec de tout petits écrans. Pas grave, j’ai peur de rien.

Quand je suis entrée, j’ai été submergée par un brouhaha incessant de discussions à toutes les sauces, et oui, celle-ci était remplie de femelles de 14 à 20 ans, portables à la main et bonbons Haribo dans la bouche. J’ai tout d’un coup réalisé que je me sentais bien seule… et bien vieille. Je me suis installée, le plus silencieusement possible parce qu’à peine 2 minutes de présence en ce lieu aurait peu flanquer une migraine atroce aux plus grandes gueules de la planète. Et oui, les filles ça piaille beaucoup trop !

Dieu merci, quand le générique de début est enfin arrivé, les mouettes ont commencé à se taire les unes après les autres, et j’ai pu enfin goûter au silence si agréable des salles obscures… enfin presque : les bonbons Haribo étant toujours présents.

Prés de 2 heures plus tard, je suis submergée par un tourbillon d’émotions. Le plaisir déjà, de retrouver une distribution brillante. Rob Pattinson bien sûr qui nous prouve encore une fois, qu’en plus d’être un beau gosse, il est un formidable acteur.

Mon plus grand coup de cœur va à ces parents confrontés à cette mélancolie filiale (thème du film) : Pierce Brosnan en père détaché, Chris Cooper en veuf tourmenté, Lena Olin en mère aimante… malgré le peu de présence à l’écran, ils nous troublent par leur formidable jeu d’acteur, parce que ce film ne parle pas uniquement du mal être de deux jeunes adultes. Il parle aussi de la douleur d’être parent. De cette difficulté que nous avons à voir grandir nos enfants, à les voir souffrir, à les laisser partir. Cet amour qui nous lie aussi incompréhensible soit il est la source de tout. Aimer à en avoir mal, c’est ça être parent. Chacun, à leurs manières, ont su exprimer toutes les facettes de ce rôle souvent empli de joie, parfois ingrat, affligeant inévitablement. Parce qu’il est difficile de faire le deuil de l’enfant parfait, celui qu’on avait imaginé. Parce que sentir basculer dans le néant la chair de sa chair, sans pouvoir intervenir, est un supplice. Parce que survivre à leur disparition est un enfer. Cette impression de continuellement passer à côté est immuable, nous ne faisons jamais les bonnes choses aux bons moments.

Remise en question permanente, tel est le fardeau de tous parents. Du petit rhume choppé à la crèche, à l’échec professionnel, en passant par la première fois ratée parce qu’on a fait semblant d’oublier d’expliquer comment utiliser un préservatif (il est évident que nos enfants n’auront pas de relations sexuelles avant 45 ans!), nous nous sentons responsable de tout[[Putain de culpabilité]]. Et cette réalité nous est jetée en plein figure dés la naissance. Passé ce moment merveilleux de communion totale, de cette rencontre si particulière où nous avons le sentiment de ne jamais avoir été aussi proche de Dieu qu’à cet instant, c’est le poids écrasant des responsabilités qui nous incombent qui prend le relais… et nous paniquent au point de se dire « Mais, qu’ai-je fais ? »

Et puis il y a le premier sourire, le premier « arreuh ! » qui nous laisse comme un air béat sur le visage en se disant que sa fille sera une grande oratrice (ou une belle mouette en devenir), le premier « maman » qui nous rend super fière et surtout, le premier collier de pâtes. C’est le plus important le collier de pâtes. Ce simple bijou de féculents reliés par un fil de pêche offert pour la fête des mères est un véritable trésor. Quand j’ai reçu le mien, il n’y a pas si longtemps, j’ai pleuré comme une madeleine. Parce que c’est une grande étape, un rituel qui symbolise notre rôle et qui nous donne le sentiment de faire partie intégrante de cette grande famille universelle des parents qui ont reçu un collier de pâtes. Je l’ai gardé très précieusement et je le ressort à chaque moment de doute. Mais malgré les difficultés passées, présentes et à venir, c’est quand même chouette d’être parents.

C’est dingue ce qu’une petite production, sans prétention d’1h53 minutes peut nous inspirer comme réflexions. N’hésitez pas à braver les mouettes aux bonbons Haribo pour ce film. Émotions garanties.