Rencontre avec Eric Toledano & Olivier Nakache

Dans le cadre d’une présentation sur la Soirée spéciale Intouchables, qui aura lieu sur la chaîne Canal+ le 21 décembre, Onirik a été convié dans les locaux de Canal+ à voir deux documentaires passionnants, Autour d’Intouchables et Intouchables of the world, qui tentent de décrypter le film-phénomène.

Récit d’un délicieux entretien en petit comité, autour d’un succulent buffet et de sachets de M&M’s aux couleurs d’Intouchables (gros clin d’oeil au film, pour ceux qui connaissent) !

Anatomie d’un succès

Jamel Debbouze a très justement qualifié Intouchables de « film de la réconciliation« . Les deux thèmes centraux du film, liés par une histoire d’amitié indéfectible, la banlieue (le personnage d’Omar Sy) et le handicap (le personnage de François Cluzet) sont tout autant responsables du succès du film que des polémiques qu’il a suscitées.

Le fait est, cependant, que grâce à ce film, la question du handicap s’est posée différemment en France, la lumière a été faite sur de nombreuses associations d’entre-aide [[L’association Simon de Cyrène, par exemple, touche 5 % des bénéfices réalisés par les producteurs du film, et a pu construire des logements adaptés]] et le regard sur la personne en situation de handicap a quelque peu évolué.

D’autres pays ont vu également ce sujet venir sous le feu de leur actualité grâce au film, notamment l’Allemagne et la Grande-Bretagne, nous a confié Olivier Nakache, suite à notre question à ce sujet.

Quant à la thématique de la banlieue, pour Eric Toledano, il s’agit un aspect bien plus problématique, il évoque même l’idée de « tabou« , selon lui, la France n’est pas encore prête à ouvrir un véritable débat sur la banlieue.

Un réalisateur à deux têtes

Les deux cinéastes, qui nous ont raconté s’être connus à l’âge de 17 ans en colonie de vacances, où ils rêvaient déjà du 7e art [[Olivier Nakache a raconté qu’ils connaissaient des répliques de films de Claude Lelouch par coeur, peu banal]], n’ont pas encore de recul sur l’incroyable succès du film, ils ont passé toute cette année autour du monde, à le promouvoir, notamment aux Etats-Unis.

L’aventure du film, c’est aussi des moments magiques, mythiques, inoubliables, qu’ils ont tenu à partager ensemble. Lors de leur périple, ils n’ont été séparés qu’une seule fois, Eric seul à Boston et Olivier à Philadelphie, mais n’ont pas réussi à apprécier ces villes l’un sans l’autre.

Ecrire à quatre mains, penser avec deux têtes, vibrer avec deux coeurs, voilà tout ce qui lie les deux hommes depuis des années. Même s’ils ne sont pas toujours d’accord, ils n’envisagent pas de travailler autrement.

Ils se verraient bien continuer dans le genre de la comédie sociale, un peu comme dans le cinéma britannique, à l’instar de Mike Leigh ou Ken Loach.

L’après Intouchables

Eric et Olivier travaillent déjà (depuis le mois de septembre) à un autre projet, nous n’en saurons bien évidemment pas plus pour l’instant, mais il implique encore Omar Sy. Avant cela, il faudra vivre encore la course à la nomination à l’Oscar, nous serons fixés le 10 janvier 2013.

Le grand producteur Harvey Weinstein [[Le grand manitou d’Hollywood, machine de communication redoutable, qui a porté l’an passé The Artist à bout de bras jusqu’au succès que l’on connaît]] en est sûr, le film va décrocher une statuette. Dans son escarcelle, la distribution du blockbuster français sur le marché américain, diffusé dans environ deux cents salles (des art houses, l’équivalent de nos salles art et essai) mais aussi la possibilité d’en faire un remake [[On parle actuellement de Colin Firth pour reprendre le rôle de François Cluzet]]. La conjoncture semble bonne.

Si l’on a proposé à Eric et Olivier de tourner aux Etats-Unis, aucun projet n’a pour le moment retenu leur attention. L’aventure américaine les tente, mais pas à n’importe quel prix. C’est tout à leur honneur.

Les pieds sur Terre, bien dans leurs baskets, les jeunes réalisateurs ne prennent pas leur succès pour un acquis, ils ne cherchent pas à recréer un tel phénomène pour leur prochain film, même s’ils savent qu’ils seront attendus au tournant.

Finalement, Intouchables, film de copains qui n’avait d’autre ambition de taquiner les consciences bien pensantes sans les choquer et surtout de faire rire sans se moquer, est devenu un véritable phénomène de société dans l’hexagone, mais également dans beaucoup de pays aussi, le symbole d’une nouvelle image de la France, plus tolérante, plus ouverte, et profondément humaniste.

Merci beaucoup aux très sympathiques Eric Toledano & Olivier Nakache, Canal+ et tout particulièrement Marilyne Guillard.

Crédit photo : Claire Saïm pour ©Onirik.net