Pour une fois – Avis +/-

Présentation officielle

La poisse, Stephen McQueen connaît bien. Un divorce mal cicatrisé, une enfant qui le prend de haut, un studio minable dans une banlieue perdue, un CV qui déborde de rôles de figuration muette et inanimée… Pour ce trentenaire londonien, la vie a un goût amer. Pourtant, il le sait, il le sent, il ne lui manque pas grand-chose pour enfin mettre son nom en haut de l’affiche. Et voici que le destin semble lui offrir une chance de révéler son talent.

Promu doublure-remplaçant du célébrissime et so sexy Josh Harper, Stephen attend chaque soir l’occasion de jouer les premiers rôles. Mais l’arrogante star n’est pas prête à partager la vedette, et prend même un malin plaisir à tourmenter et humilier ce pauvre Stephen. Alors que ce dernier pensait avoir touché le fond, la fortune place sur son chemin la belle et sensible Nora, la femme de Josh… L’amour ou la gloire, telle est la question.

Avis d’Artemis

Auteur du célèbre Un Jour, adapté au cinéma en 2011 avec Anne Hathaway et Jim Sturgess, David Nicholls nous emmène cette fois dans le monde redoutable du show business, où les stars côtoient celles qui rêvent de l’être, où tout semble facile pour ceux qui ont réussi. Ce livre est paru sous le titre The Understudy, signifiant littéralement « la doublure », rôle qu’occupe le héros – ou plutôt l’anti-héros – de cette histoire.

Le roman s’ouvre sur une scène cocasse où Stephen C. McQueen (à ne pas confondre avec le célèbre Steven Mc Queen répète-t-il) joue le cadavre dans une série policière. Cet humour britannique décapant se retrouve à divers endroits du livre, notamment dans les titres des chapitres, dont le côté parfois complètement décalé ne manque de faire sourire le lecteur.

Stephen McQueen, pour revenir à lui, a tout de l’anti-héros : pathétique, ayant échoué tout autant dans sa vie personnelle que professionnelle, il n’a rien de vraiment attachant. Tout en tentant de faire sa place, il accumule les rôles de figuration ou des seconds rôles négligeables, son plus grand succès étant Sammy l’écureuil. Il a tout de l’homme perdu, qui n’a pas réussi à trouver son équilibre personnel.

D’ailleurs, sa vision de la vie est parlante, en décalage de la réalité : « La vie ne lui paraît jamais plus belle, plus vraie ou plus intense que lorsqu’elle ressemble à celle que l’on voit sur grand écran : pleine d’accélérations et de ralentis, de dernières répliques bien envoyées et de doux fondus au noir. » On a la sensation que Stephen n’est pas seulement doublure professionnelle, mais comme une doublure dans sa propre vie.

Justement, lorsqu’il devient la doublure du « douzième homme le plus sexy du monde », Josh Harper, dans une pièce de théâtre à succès sur la vie de Byron, il sent que sa chance va peut-être enfin tourner. En attendant, il se concentre sur le petit rôle de la silhouette fantomatique qu’il interprète dans la pièce, qui lui vaut son nom en tout petits caractères en bas de l’affiche, consistant à : « S’avancer (d’une démarche spectrale), ouvrir la porte (lentement), s’incliner (lugubrement), refermer la porte (lentement) et sortir (rapidement).« , ce qu’il accomplit en se prenant très au sérieux…

Mais Josh Harper n’est pas du genre à tomber malade à la première occasion, et Stephen est prêt à tout accepter pour se rapprocher de la vedette, même l’humiliation d’être serveur à une soirée à laquelle il a été invité. Josh Harper est en effet l’archétype de la star qui s’admire, qui est consciente de son talent et en joue.

Sans valeurs, il n’hésite pas à tromper sa jeune épouse. Mais c’est lors de cette fameuse soirée que Stephen rencontre la jeune femme, Nora, et il tombe immédiatement sous le charme. Cela ne risque-t-il pas de compromettre son avenir ?

La trame du roman est légèrement prévisible, et malgré des passages à l’humour acerbe, on déplore quelques longueurs. Par ailleurs, même si cela dépend de la sensibilité du lecteur, il est assez difficile de s’attacher à Stephen – anti-héros que l’on a parfois envie de secouer – et par conséquent à son histoire.

En revanche, l’environnement dans lequel David Nicholls situe son roman est fort bien dépeint, et on ressent tout à fait l’impersonnalité des relations, le gouffre entre image médiatique et réalité, tout ce qui se dissimule derrière la célébrité rapide.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 432
Editeur : 10/18
Collection : Littérature étrangère
Sortie : 5 juin 2014
Prix : 8,40 €