Les addictions à Internet – Avis +

Présentation de l’éditeur

Notre société hyperactive a une obsession : échapper à la réalité, synonyme d’ennui et de frustration. Internet le lui permet en rendant possible un monde virtuel, accessible, maîtrisable, apparemment facile à vivre et à supporter. Aujourd’hui, en France, près de 30 millions de personnes utilisent cet outil. Le problème c’est que l’Internet possède un potentiel addictif et que plus il y a d’utilisateurs, plus il y a d’utilisations pathologiques.

L’addiction à Internet est devenue une question de société. Elle concerne les jeunes comme les adultes et doit être définie, comprise, soignée. Tel est l’objet de ce livre destiné aux praticiens comme aux parents et qui jette sur cette « toxicomanie sans drogue » un regard lucide.

Avis d’Enora

Dans cet ouvrage particulièrement complet, les psychiatres Michel Hautefeuille et Dan Véléa analysent cette nouvelle addiction, la cyberdépendance – à ne pas mélanger avec les dépendances cyberassistées où internet n’est que l’objet permettant d’assouvir son addiction.

La cyberdépendance appartient à ce qu’on appelle la toxicomanie sans drogues. Mais qu’est-ce qui permet d’affirmer le caractère pathologique d’une addiction ? Se nourrir est normal mais la boulimie est pathologique. Il existe donc des normes, des codes qui définissent la normalité et dont la transgression définirait la maladie. La limite est tenue ! D’autant que les sociétés acceptent et même favorisent certaines dépendances qui sont ce qu’on appelle des amortisseurs sociaux. Ce que la société n’accepte pas ce sont les addictions qu’elle ne contrôle pas et/ou la mettent en danger

Un être dépendant est souvent un individu en souffrance, qui veut combler un vide identificatoire et présente une immaturité socio-affective. Que ce soit les jeux vidéo en ligne, les jeux de rôles en ligne, les chats, les sites, les blogs, les forums, ils permettent à des individus en détresse morale, sociale et individuelle de se réinventer une nouvelle identité dans un monde de rêve où la communication virtuelle remplace les contacts sociaux réels, redoutés.

La pathologie ne nait pas de l’objet mais de celui qui s’en sert à un moment socioculturel donné. Pour certains, internet sert à compenser une insatisfaction ou une difficulté de la vraie vie ; la cyberaddiction comme toutes les addictions est donc une réponse maladroite à un problème initial. Problème individuel ou social qui varie avec le temps. Actuellement, par exemple, les individus sont tenus à une obligation de réussite, une injonction au bonheur et l’obligation de gérer un vaste temps libre, désiré ou non.

A une époque où le domaine de l’excès est vendeur et porteur, la notion de norme qui ferait frontière entre normal et pathologie est extrêmement difficile à définir. Les auteurs argumentent pour que cette définition se fasse plus sur une base qualitative que quantitative, en prenant en compte le niveau de souffrance et de perte de communication ainsi que la violence que la personne s’inflige ou fait subir à l’entourage. Leurs réponses s’appuient sur leur pratique et met en avant l’importance du renforcement des liens familiaux ou sociaux : travailler avec la personne sur le problème de base et lui permettre de gérer son excès en lui redonnant son libre choix vis à vis de l’objet de ses dépendances, ici internet.

Michel Hautefeuille et Dan Véléa nous livre une analyse pointue et pleine de bon sens, en ne sacralisant ni ne diabolisant internet mais en remettant cet outil technologique moderne dans son contexte social et culturel, tout en pointant ses dangers pour les plus jeunes et les plus fragiles.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 200
Editeur : Payot
Collection : Essais Payot
Sortie : 12 mai 2010
Prix : 18 €