Grandeur et décadence d’un petit commerce de cinéma – Avis +/-

Présentation du film

On a dit du cinéma qu’il était une usine à rêves… Côté rêves, il y a un metteur en scène : Gaspard Bazin qui prépare son film et fait des essais pour recruter des figurants. Côté usine, il y a Jean Almereyda, le producteur qui a eu son heure de gloire et qui a de plus en plus de mal à réunir des capitaux pour monter ses affaires. Entre eux, il y a Eurydice, la femme d’Almereyda, qui voudrait être actrice. Tandis qu’Almereyda cherche de l’argent pour boucler le financement du film, et cela au péril de sa vie – car l’argent qu’on lui promet n’a pas très bonne odeur, Gaspard fait des essais avec Eurydice.

Avis d’Anna

Grandeur et Décadence d’un petit commerce de cinéma devait être en 1986, lors de sa diffusion à la télévision, une adaptation du roman Chantons en cœur (The Soft Centre titre originel) de James Hadley Chase. Mais Jean-Louis Godard en a fait tout autre chose et n’en a gardé que l’essence.

Sous fond de film noir, Godard nous montre les dessous d’une société de production. À la tête d’Albatros Films on trouve Almereyda, joué par Jean-Pierre Mocky. À ses côtés, il y a Gaspard Bazin, le directeur de casting, interprété par Jean-Pierre Léaud.

Ce duo, souvent pompeux, l’un par ses discours sur le cinéma, l’autre sur l’argent, occupe l’espace narratif. Et rien ne semble exister en dehors de leurs préoccupations respectives.

Eurydice, la femme d’Almereyda, elle, aspire à devenir actrice, plutôt qu’une femme au foyer désœuvrée et sous la tutelle financière de son mari. Elle se tourne ainsi vers Gaspard pour trouver de l’aide, au désespoir de son mari.

À Albatros Films, les journées se suivent et se ressemblent : Gaspard fait continuellement passer des castings à des acteurs, non professionnels. Pour autant, il est difficile de comprendre son projet. Almereyda, lui, court à droite et à gauche, dans l’urgence, à la recherche d’argent, sans pour autant que ne soit expliqué les raisons de cet empressement.

On comprend très vite les difficultés financières que rencontre Albatros Films et sa difficulté à exister et à s’imposer dans un paysage audiovisuel dominé par la télévision. Cette galère, ils ne sont pas seuls à la vivre.

Nombreux sont les demandeurs d’emplois de l’A.N.P.E., en fil, quotidiennement, devant leur société, pour faire des auditions, payées au lance-pierres.

Jean-Louis Godard semble dénoncer avec ce film les laissés-pour-compte de l’audiovisuel, ceux et celles qui – créateurs, producteurs, acteurs etc. – piétinent dans la misère et souffrent pour leur art, tandis que la qualité n’est pas forcément au rendez-vous dans les cinémas et à la télévision.

Somme toute, Grandeur et décadence d’un petit commerce de cinéma est un film difficile à apprécier, autant par son sujet que par son traitement. En effet, la construction du film brouille le fil narratif et l’on a parfois du mal à suivre les différents arcs présentés. Pourtant, ce grand fouillis finit tout de même par faire sens.

Il est cependant important de souligner le soin apporté à la bande-son, superbe, du film, avec notamment Me and Bobby McGee de Janis Joplin. Lorsque l’on entend la phrase : Freedom is another word for nothing left to lose dans cette chanson, on ne peut s’empêcher de penser à la passion et à la détermination qui animent ceux et celles qui font du cinéma, à l’image d’Almereyda qui en payera le prix fort.

Fiche technique

Sortie : 4 octobre 2017
Durée : 1h35
Acteurs : Jean-Pierre Léaud, Marie Valera, Jean-Pierre Mocky, Caroline Champetier et les chômeurs de l’A.N.P.E.
Genre : Drame
Distributeur : Capricci Films