Ca suffit ou il suffit de !

Tout a commencé par des ça suffit

1) lorsque je me suis aperçue qu’une série de livres policiers féminins qui se suivaient (les personnages en corrélation avec plusieurs autres qui revenaient dans chaque bouquin) était éditée dans le désordre, et certains romans manquaient… comme des suites de romans de type “Régence” mais aussi, des écrivains considérés comme talentueux aux Etats-Unis jamais traduits en France…

2) lorsque je me suis aperçue que je possédais un roman traduit il y a des années chez Belfond ainsi que le format poche [[dernièrement édité par J’ai Lu]], et que certains passages avaient été sauvagement coupés sans aucune réelle raison nuisant à la cohérence de l’histoire (Quand l’ouragan s’apaise de Kathleen Woodiwiss : je peux produire les deux versions). Ce tronçonnage vient certainement d’un formatage pour le format poche restreignant un certain nombre de pages, mais aussi d’une auto-censure bien à la mode [[oui, ce sont souvent des scènes sensuelles]], sans parler des traducteurs non intéressés commettant des phrases fantaisistes formant un contresens ou ne voulant rien dire. Sans oublier une relecture bâclée laissant passer de véritables âneries.

3) lorsque j’ai acheté un livre de la collection J’ai Lu – Pour elle, et que 40 pages avaient été substituées par un traité new age ! J’ai téléphoné à l’éditeur où une charmante personne [[qui m’a fait d’ailleurs parvenir gratuitement deux autres romans en dédommagement]] m’a indiqué que « vu que c’était un problème sur toute ma région ; que ces livres n’étaient pas considérés comme suffisamment importants pour faire l’objet d’un suivi…. » et tant pis pour le fameux bouquin ! Si vous interrogez les traducteurs, ils vous avouent considérer cela comme un travail rémunéré sans envie ni passion, et que le choix des livres et la relecture après traduction est faite par des personnes rémunérées mais absolument pas spécialisées [[dommage qu’on ne me le demande pas !!!]]

4) lorsque je me suis aperçue que par exemple pour ceux qui sont afficionados de Eve Dallas écrits par Nora Roberts en France, ils sortent actuellement des livres édités originallement en 2004… (et comme Miss Roberts en publie deux par an (sauf exception) faites le compte du retard). La série Stephanie Plum de Janet Evanovich [[en poche]] se retrouve avec deux ans de retard sur ce qui paraît actuellement dans les pays anglo-saxons !

5) enfin, lorsque j’ai vu que les éditeurs allemands et espagnols ont un grand respect pour les lecteurs et ne font aucune différence entre le lectorat des romans féminins et les autres. En plus, ils ont la chance d’avoir tous les genres du roman sentimental sans restriction (ainsi les romans avec des héros de l’armée américaine, des histoires sentimentales gays, des romans sentimentaux érotiques ou sado-masochistes, etc.). Ils ont aussi des éditeurs concurrents, alors que nous avons seulement deux maisons d’édition qui sont complémentaires, vu qu’il n’y aucune émulation entre elles. En plus, lorsqu’on interroge ces groupes français pour savoir pourquoi certains thèmes ne sont jamais évoqués (rien n’est plus moral qu’un Harlequin ou qu’un J’ai Lu dans la grande tradition de Barbara Cartland en un tout petit peu plus hot mais avec les mêmes codes et tabous) ils vous répondent que la lectrice lambda n’est pas prête. Sauf que les Américaines souvent qualifiées de prudes ont le droit à des héros nettement moins calibrés : je suis naturellement bon, beau, riche et je cherche une épouse. Elles ont droit à des histoires plus glauques, des personnages beaucoup plus nuancés ayant une morale élastique, leurs aspects amoraux sont non-condamnés etc…

La goutte d’eau qui a fait débordé le vase a été la réponse d’un éditeur lorsque que plusieurs lectrices (dont une amie et moi) attendions le dernier roman d’une série de six livres [[seulement deux étant parus en France]] « il n’était pas dans les intentions de J’ai Lu de faire paraître le dernier » !

Puis sont arrivés les il suffit :

1) de se dire j’ai fait en tout… 9 ans d’anglais. Cela fait 20 ans que je ne le baragouine plus [[je ne l’ai jamais bien pratiqué !]] et est-ce qu’il est possible sans pouvoir aligner une phrase correcte de le comprendre ? Il suffit alors de se secouer et se lancer un défi…

2) de prendre un dico ou de se mettre en ligne sur un lien très intéressant et ludique : www.wordreference.com, lorsque l’on est motivé, mais un peu paresseux, cela aide énormément… et de se bloquer un peu de temps. Voyons un peu ce que je vais réussir à lire.

3) d’avoir le courage de commencer par un livre que l’on rêve de lire depuis des années, contemporain si possible. En effet, les livres historiques ont un vocabulaire souvent plus riche et plus recherché et cela devient fastidieux de chercher des mots en permanence. Pour les romans féminins, je conseillerai en fait [[mais je ne l’ai pas fait]] des livres assez courts de Jayne Ann Krentz. L’écriture est assez simple et la compréhension est aisée. Ma grande surprise a été Anne Stuart dont l’écriture est bien plus facile que je ne le pensais. Les histoires sont tellement prenantes, mais aussi bien plus provocatrices, que les romans formatés qui paraissent pour le moment en France.

4) de ne pas prendre le temps de faire une phrase correcte de ce que l’on se traduit dans la tête en lisant. Même s’il manque un mot si l’on a compris le sens de la phrase on ne cherche pas celui qui nous fait défaut, sauf si l’on sent qu’il apportera une précision indispensable. Surtout au début, il faut avancer, puisque le rythme nous paraît soudain être au ralenti… et que cela nous déconcerte !

5) de ne pas faire cela, au départ… seul. En fait, si un ami fait la même chose de son côté, cela offre une saine émulation. Vous avez envie d’en parler avec lui. Il vous sert de coach, vous encourage à aller jusqu’au bout. Peut-être est-ce un exercice au départ et non un plaisir ? Au bout du troisième bouquin, le tour est joué. Vous ne cherchez que de moins en moins dans le dico, la lecture se fluidifie.

6) d’avoir assez de colère au départ devant le dédain des éditions françaises et trouver une motivation supplémentaire en disant et bien j’arrête d’acheter vos produits [[pour eux ce n’est que cela]]. Parce que lorsque l’on réfléchit bien, ils se disent : « ces ménagères non éduquées [[oui, ils le pensent fortement]] achèteront que l’on prenne le temps de traduire bien ou non, alors autant mettre 250 pages pour tous, même s’ils en font 300 dans l’œuvre originale. Elles aiment Barbara Cartland, alors on réédite pour pas cher, vu que les traductions sont faites » même si la dame en rose écrivait dans les années 60, 70 pour finir dans les années 80 sa carrière au même titre que Delly ou Max du Veuzit fait figure d’ancètres des romans à l’eau de rose. Leurs idées reçues datent d’il y a 20 ou 30 ans… Alors tant pis, ce sont les éditeurs américains qui profiteront de mon pouvoir d’achat !

Voilà comment je suis passée du côté rose-obscure de la force …

On m’appelle Darth Marnie, maintenant !