Bons baisers de Russie – Avis +

Kerim s’enfonça dans son siège. Il prit une cigarette. Ils se mirent à fumer. Bond regardait les rues crasseuses et se disait qu’une lumière indigente caractérise une ville pauvre. Kerim fut quelque temps sans parler.

– Le Tzigane a dit que nous avions tous les deux sur nous les ailes de la mort. Il a dit que je devais me méfier d’un fils des neiges et que vous deviez faire attention à un homme qui est possédé par la Lune.

Pour l’URSS la guerre psychologique fait partie de leur arsenal. Comment s’attaquer aux services secrets britanniques? En s’en prenant à un de leur homme-clef, en l’assassinant tout en le discréditant. La cible est un dénommé James Bond. Pour le piéger on utilisera deux appâts: une machine à décoder et une jolie femme totalement dépourvue de subtilité.

En ce qui concerne le premier appât précisons que durant la Seconde guerre mondiale un agent des services secrets britanniques eut l’idée de l’opération « Sans-pitié » destinée à récupérer les codes Enigma de la Kriegsmarine. Cette opération menée de main de maître par un certain Ian Fleming échoua lamentablement.

Ce roman est remarquable par la peinture de personnages comme Kerim agent anglo-turque entièrement dévoué à la cause britannique. Mais on trouve également Rosa Klebb l’organisatrice des assassinats du SMERSCH [[le film transforma l’organisation soviétique SMERSCH en organisation privée SPECTRE, ceci afin d’éviter des complications diplomatiques. Précisons que le SMERSCH exista officiellement de 1943 à 1958. ]], experte dans l’art de provoquer les aveux lors des « interrogatoires » et surtout Grant Donovan assassin destiné à affronter Bond. C’est d’ailleurs lui qu’on nous présente en premier. Nous apprenons ainsi que James Bond est destiné à affronter un loup-garou. En effet Grant, physiquement pourvu d’en embryon de queue, est mentalement influencé par la Lune qui entraîne chez lui des pensées homicides. L’aspect moral ne le dérange absolument pas, mais il est parfaitement conscient des conséquences possibles pour sa personne. Lorsque le soldat britannique Grant trahit son pays en proposant ses services aux Russes, c’est pour avoir l’occasion de tuer en toute impunité alors que tôt ou tard ses penchants seront découverts s’il reste au service des Anglais.

Cependant on peut se demander pourquoi les services secrets soviétiques recrutent Grant au lieu de l’éliminer ou de le renvoyer aux Britanniques ? Des combattants rusés et physiquement aptes ne manquent pas dans leur pays. Pour cela Ian Fleming se lance dans une démonstration en quatre points :

– en Russie l’exécution des opposants est une solution simple pour résoudre les problèmes
– la Russie comptant 200 millions d’habitants on peut en tuer chaque années plusieurs milliers sans qu’il y paraisse
– le problème concerne les exécuteurs qui au fur et à mesure de leur « activités » deviennent dépressifs, donc moins efficaces. Il faut donc les éliminer à leur tour avant de les remplacer par quelqu’un qui tôt ou tard connaîtra le même sort
– Grant n’a aucune chance de devenir dépressif. Il aime son travail.

Fiche Technique

Titre original : From Russia with love
Traduction : André Gilliard
Editeur : Livre de poche
Collection : Thriller
Sortie : septembre 2001
Prix : 4,60 euros
Réédition, poche, 320 pages